Du 18 mars au 22 avril a eu lieu au Jeu de Paume, chaque vendredi à 18h30, un séminaire dédié à la série télévisée contemporaine. Animé par le critique de cinéma Emmanuel Burdeau, il s’adresse à tous. Pour tous ceux qui n’auraient pas pu y aller, voici un résumé à mi-parcours des 3 premiers épisodes.
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« DES/CHAINES, formes et formats de la série télévisée contemporaine » : la programmation de ce séminaire sur les séries télévisées, du 18 mars au 22 avril, au Jeu de Paume, temple de la réflexion sur l’image, est un indice supplémentaire, s’il en fallait, de la consécration statutaire de cette production en art, créatif et inspirant, qui peut s’exonérer de la comparaison permanente avec le cinéma. Une liberté et maturité artistique fondées sur l’affranchissement de formes parfaitement maîtrisées qu’Emmanuel Burdeau, critique de cinéma, nous invite à explorer, avec la jubilation et l’érudition d’un authentique passionné. Il nous invite également à réfléchir à l’articulation entre conception, production, supports de diffusion et modes de consommation pour les séries.
Lors de la première session, Emmanuel Burdeau a introduit son propos avec Breaking Bad et en se référant à Serge Daney. Il a posé deux questions majeures : la télévision, au moment même où elle est en tant qu’objet et industrie très menacée et concurrencée par les opérateurs web, est-elle en train de devenir le nom d’un art, d’une catégorie critique à part entière, de manière positive et non uniquement en creux par rapport au cinéma ? Il note une correspondance entre, d’une part, l’évolution des modes de production – les chaînes télé ont cessé de tenir le haut du pavé, les séries sont désormais beaucoup produites par des opérateurs web, libérant les showrunners de la contrainte des programmes, de la livraison hebdomadaire etc –, l’évolution des modes de narration, avec une délinéarisation des récits, et enfin l’évolution des pratiques spectatrices, elles aussi désormais multiples. Ce « dé-chaînement », au moment où la série appelée télévisée par commodité explose au point que certains redoutent un peak series, est certainement le signe d’une grande liberté créative. L’image de Breaking Bad, en fond visuel, en est une illustration irréfutable.
Le second vendredi fut introduit par des extraits de Horace and Pete, websérie écrite et réalisée par Louis CK. L’originalité de cette série est qu’elle paraît sans aucune promotion préalable, afin de préserver l’effet de surprise et le plaisir de la découverture. Produite et diffusée sur le web, elle joue sur les codes et contraintes de la SITCOM, et est le signe d’une « uberisation » de la série traditionnelle. Puis nous avons accueilli l’invitée de la soirée, Christina Wayne, productrice qui fut notamment en charge du développement de Mad Menet de Breaking Badpour la chaîne AMC. Ex scénariste à LA, elle arrive en 2005 à New-York et est chargée de développer la riposte de AMC au succès de HBO et des Soprano. Son job de « network executive » » consiste, en miroir de l’auteur, à faire le filtre de ses intentions créatives, à lui dire « oui » ou « non ». Elle nous livre quelques anecdotes sur sa collaboration avec Matthew Weiner et Vince Gilligan. Aujourd’hui, devenue productrice à part entière, elle a créé sa propre société de production, consciente qu’avec le web, la distribution de série se fait directement au consommateur et que désormais, le plus important, c’est de créer et de posséder le contenu. La série qu’elle produit,I’m dying up heresera lancée en 2017.
Ses préoccupations lorsqu’elle lit des projets : pourquoi commencer la série maintenant ? (pour avoir un bref aperçu de la structure en 123, n’hésitez pas à visionner notre formation gratuite aux fondamentaux de l’écriture agile) / est-on dans un monde que nous n’avons pas encore vu (une arène originale) ? / le personnage peut-il durer sur 7 saisons ?
La troisième session a posé la question suivante : dans une série, qu’est-ce finir et (re)commencer ? Qu’est-ce qui se passe dans l’intervalle ?
Retour sur la fin des Soprano : le destin de Tony reste suspendu, et pourtant la programmation de la série est terminée. Dans the Office, par une mise en abyme, on partage l’inquiétude portée par les personnages de la série sur leur propre survie : la vie des personnages continue-t-elle quand la série s’arrête ou, bien au contraire, les choses commencent quand la série s’arrête ? Emmanuel Burdeau enchaîne sur les modes de continuité et de discontinuité qui sont choisis dans les séries. Deux tendances se dégagent : des séries qui inventent des discontinuités audacieuses, tirant profit de l’intervalle entre deux épisodes, telles Fargo, et des séries qui inventent des modes de continuité inattendus -extraits de Catastrophy et de Love.
Autant de questions qui sont au cœur de la méthodologie High Concept et sont abordées notamment dans les masterclass vidéos écrire et vendre une série et celle dédiée au secret des showrunners consacré aux techniques du breakdown.
Fred Mamiah
Je suis très fasciné par les séries et je suis entrain d’en écrire une moi même. Bien entendu, je suis un amateur et c’est en tant que profane que je me jette dans cette aventure animé par une forte passion des séries et de l’écriture. Mais avant, je cherche à apprendre, comprendre le processus de création et d’écriture d’une série de de l’idée vers les arcs narratifs en passant par les personnages… bref toutes formes d’apprentissage qui tend à m’aider dans mon processus de création est une bénédiction pour moi et cette plateforme en fait partie. Bien que je n’ai pas pu participer à ces séminaires, leur résumé me sont très utile dans mon projet.