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Fiction US vs séries françaises: une différence de culture

Le CSA vient de sortir une étude sectorielle sur la production de fiction aux États-Unis qui nous montre que les différences majeures entre les conditions de production de la fiction américaine et celles de la fiction française ne sont pas forcément uniquement explicables par des différences d’échelles ou de modèle économique, mais surtout, qu’elles résultent d’une différence de modèle culturel.


Si le modèle traditionnel des networks est cependant toujours d’actualité (des chaînes qui dépendent de la publicité majoritairement), il faut aussi compter aujourd’hui avec la concurrence des câblo-opérateurs (télévision par abonnement et télévision câblée avec pub) qui fonctionnent avec un modèle alternatif qui mérite aussi d’être commenté. À ces deux modèles, des nouvelles sources de revenus comme la vidéo à la demande, le téléchargement depuis Internet viennent s’ajouter pour augmenter les recettes globales d’un genre devenu définitivement roi en TV. Il apparaît ainsi que si la situation de la production audiovisuelle aux États-Unis est aujourd’hui dans une phase de transition, cela est notamment dû à l’émergence de ces nouveaux moyens techniques et en particulier numériques (moyens dont la fiction française ne bénéficie pas encore malheureusement).

La TV US est-elle l’avenir de notre propre télévision ?

À l’heure où les chaînes françaises commencent à attaquer le marché international en faisant des coproductions et en délocalisant massivement leurs productions à la recherche d’économies budgétaires, il semble que de nouveaux équilibres se dessinent et que les changements tant attendus se profilent. Mais voyons plus loin.

  1. Deux modèles concurrents s’opposent aux Etats-Unis :
    D’un côté nous avons le modèle des gros networks issus de la Télévision publique qui s’orientent vers une industrie de franchise, de l’autre nous trouvons le modèle des chaînes du câble (payantes), qui au lieu de viser le public le plus large, cible un public précis au moyen d’une programmation spécifique.

    • Même si les grands networks ont dû s’adapter à la concurrence au fil des années et rechercher des cibles d’audience moins larges, ils essayent tout de même de rester sur des cibles familiales pour en permanence attirer la ménagère et les jeunes de dix-huit à vingt-cinq ans, cibles à fort pouvoir d’achat. Comme les coûts de production des séries ont beaucoup augmenté et les recettes de la publicité ont eu tendance à baisser avec l’essor de nouveaux moyens de distribution, ces chaînes ont eu tendance ces derniers temps à se regrouper et à miser aussi sur d’autres types de programmes comme la téléréalité.
    • Le câble, lui, repose sur les abonnements et regroupe une audience plus jeune et plus ciblée pour les séries. Dans ces chaînes, on parle d’indice de satisfaction plus que d’audience. Ce sont ces chaînes qui ont été les plus innovantes ces dernières années, HBO et Showtime en tête de file.
  2. Le phénomène des studios :
    En France, il y a deux entités principales dans la fabrication d’une œuvre audiovisuelle : le producteur et le diffuseur. Aux États-Unis, il faut ajouter à ce binôme, le studio. La réglementation a évolué récemment, puisque les diffuseurs US sont autorisés désormais à produire eux-mêmes leurs shows via le studio. En effet, devant la menace principale pesant sur les Networks avec le développement d’Internet et du câble, la FCC a décidé de donner plus de latitude aux entreprises audiovisuelles américaines afin de leur permettre de réagir face à cette diminution de leurs revenus et aux menaces pesant sur leur avenir (c’est ce que demandent aujourd’hui les chaînes françaises et qu’elles ont petitement déjà obtenu avec le grappillage d’un pourcentage de coproduction sur les programmes qu’elles financent pourtant à près de 75%). Aux États-Unis, l’abrogation des fin-syn rules en 1996 a ainsi permis aux Networks de produire ou coproduire une part croissante de leurs émissions. Ils ont pu également acheter ou se faire racheter par des groupes de communication et se rendre acquéreur de nombreuses chaînes câblées ou de continuer d’y investir pour augmenter leur part de marché (cf. ce qui se passe aussi chez nous sur la TNT).

    • L’intérêt de construire des groupes internationaux de grande dimension permet ainsi une intégration verticale importante : la fabrication de contenus est combinée avec la distribution.
    • L’apparition de nouveaux géants dans le secteur, comme le rachat de ABC par Disney permet surtout de réduire les coûts de programmation en bénéficiant de productions maison (à tire de comparaison, TF1 le fait sur une plus petite échelle avec TF1 production par exemple mais le phénomène est loin d’être généralisé malgré une concentration en cours du secteur de la production).
    • Ces opérations offrent notamment au distributeur l’accès direct à des stocks de programmes considérables. Ces nouveaux groupes permettent aussi d’augmenter leurs recettes publicitaires, avec une offre plus importante dans plusieurs médias et à un prix moindre que la concurrence. Les Networks US se servent aussi du câble comme rampe de lancement de services en ligne qui, à terme, devraient eux aussi générer d’importants investissements publicitaires et, par ailleurs, attirer le public qui justement délaisse la télévision « classique ».
  3. Un marché très concurrentiel :
    Les Networks ne couvrent que 50% des frais de production d’une série et leur plan de retour sur investissement inclut les ventes à l’export qui ne permettent de dégager de la marge en général qu’à partir de la troisième ou la quatrième saison alors que souvent ils n’attendent pas jusque là pour supprimer un programme. Les séries qui arrivent à durer trois à quatre ans payent donc pour tous les autres échecs.

    Aux États-Unis, une série sur cinquante (2%), parmi celles dont le pilote a été écrit reste à l’antenne (ce qui remet le chiffre français en perspective où 60% des séries lancées ont une saison 2).
    Cependant, les séries US peuvent être très rentables (jusqu’à 200%) en prenant en compte l’export. Les Studios n’hésitent donc pas à investir lourdement car la rentabilité est en quelques sortes toujours au bout du tunnel (La fiction TV est ainsi plus rentable et moins risquée que la fiction Cinéma).

    • Nous comprenons ainsi pourquoi les chaînes françaises quant à elles, renâclent à investir en masse dans des séries qui ne leur rapportent que de l’audience et donc de la publicité ou des abonnés ?! Si jamais les chaînes étaient pleinement coproductrices des fictions TV (comme la BBC par exemple), il est certain que leurs investissements pour produire des séries exportables et donc des « blocs » récurrents de 12 ou 24 épisodes seraient bien plus motivés.
  4. Une différence de culture :
    • Aux USA, toutes les personnes qui travaillent sur un film ou sur une série télévisée peuvent être assimilés à « des employés ». Le réalisateur est là pour mettre en image le scénario écrit par un ou plusieurs autres ; c’est une autre personne qui fera le montage sous la surveillance du showrunner qui pourra demander telle ou telle modification, car les postes aux États-Unis sont bien séparés et il est difficile de cumuler plusieurs tâches. Enfin, le vrai « final cut » appartient toujours au propriétaire de l’œuvre, c’est-à-dire le studio ou la production.
    • Cette façon de travailler impose une réalité, qui même si elle est admise en France n’est pas dite comme telle, qui est qu’on ne fait pas de l’art mais du commerce (bien sûr au sens noble du terme).

      L’industrie télévisuelle et cinématographique aux États-Unis usine des produits culturels à haute valeur ajoutée et vendus comme tels.
      « L’Entertainment » (l’industrie du divertissement et le cinéma en premier lieu) est le deuxième secteur d’exportation des USA après l’armement.

  5. Des fonctions spécifiques :
  6. Tant dans sa volonté d’exportation que dans sa production, la production de fiction US est une industrie puissante qui a favorisé certains rôles qui nous font encore défaut en France comme celui du showrunner (je n’y reviens pas) ou encore celui des agents (qui s’apparentent plus à des avocats qu’à de simples représentants).
    Les agents règlent les problèmes financiers et négocient les salaires, trouvent du travail, défendent leurs clients… Leur position intermédiaire est très importante dans l’industrie US car elle décharge les « artistiques » de la partie matérialiste du métier, ils sont devenus aujourd’hui de véritables apporteurs d’affaires en construisant des packages complets. Mais ce ne sont pas des philanthropes. Leurs revenus étant fondés sur celui des personnes qu’ils représentent, ils prennent 10% de tout ce que leurs clients perçoivent (rentrées publicitaires incluses).
    Enfin, les Managers, rôle qui n’a pas encore d’équivalent en France, consacrent des intervenants spécialisés dans la gestion de carrière, équivalent à un mix de nos DRH d’entreprise avec nos attachés de presse, qui gèrent les contrats, les apparitions, la communication et tous les aspects professionnels de la vie de leur client, qui à leur tour prennent 15% des recettes générées.

  7. Des frontières de plus en plus poreuses entre cinéma et TV :
    Enfin, les cloisons entre cinéma et télévision aux États-Unis sont très fines, surtout sur le câble où il existe une véritable synergie qui s’est créée entre les deux médias, les acteurs et les réalisateurs passant aisément d’un média à l’autre :

    • Quentin Tarantino réalisant un épisode d’Urgence ;
    • David Lynch showrunnant Twin Peaks ;
    • Jerry Bruckheimer produisant Les Experts ou FBI Portés disparus mais à qui l’on doit aussi les films Pirates des Caraïbes, Pearl Harbor ou Top Gun ;
    • Alan Ball le scénariste primé aux oscars d’American Beauty réalisant Six Feet Under ;
    • Glenn Close jouant dans Damages…

Que retenir ?

On comprend bien alors la différence de mentalités entre des industriels de l’audiovisuel américain et la position d’artisans que revendiquent certains producteurs/auteurs français. En France, en effet, la liberté que recherchent certains auteurs/réalisateurs s’épanouit majoritairement dans le Cinéma où les œuvres produites sont le résultat de la vision de l’auteur, propriétaire de son œuvre. La télévision française fait alors souvent figure de parent pauvre, ne profitant pas des meilleurs talents, ni du meilleur financement même si les choses évoluent lentement : certains réalisateurs, acteurs, ou auteurs venus du cinéma s’essayent à la télévision et souvent avec succès, comme Fabrice Gobert pour les Revenants, ou Vincent Elbaz dans No Limit (une production Besson) avec des budgets significatifs pendant que d’autres auteurs/réalisateurs/acteurs spécialisés en séries TV créent un véritable réservoir de talents qui commence à émerger dans des séries qualitatives d’aussi bon niveau que leurs homologues américaines, anglaises ou danoises (Ainsi soient-ils, Kaamelott, Un village français, etc.).

  • Malgré la différence de modèles économiques entre le câble et les Networks, aux USA, une série va tenir l’antenne au minimum 3 à 4 mois. C’est un rendez-vous régulier qui doit provoquer un réflexe chez le téléspectateur.

    • Sur le câble US, les séries vont servir à porter la notoriété de la chaîne qui recrute les meilleurs talents (cinéma, roman et TV) pour fabriquer des produits culturels à haute valeur artistique sur des sujets innovants et non consensuels qu’ils vont vendre à l’international comme tels. Les conditions de travail ainsi que les budgets sont souvent d’ailleurs plus confortables pour les équipes (moins d’épisodes, plus de libertés artistiques).
    • Sur les networks, les annonceurs permettent à la chaîne de rentabiliser son investissement. Les scénaristes doivent sortir un scénario par semaine en générant un maximum d’histoires car un bon sujet ne se refuse pas, l’idée est plutôt d’imaginer l’angle d’attaque pour pouvoir en parler (on pense à la franchise Law & Order SVU). Enfin, les comédiens se doivent d’être disponibles pour les différentes saisons pour lesquelles ils ont signé, en contrepartie, la série leur garantie des revenus réguliers et une grande notoriété.
  • A contrario, en France sur les chaînes gratuites, une série va tenir l’antenne pendant un mois et demi maximum (les formats en vigueur sont le 6, 8 ou 12 x 52’, diffusés par paire), il n’y a donc pas de fidélisation forte des téléspectateurs.
  • Parfois pour faire « durer » la saison, les programmateurs passent des anciens épisodes avec quelques inédits pour compenser la faiblesse de volume. Pour les scénaristes, c’est le règne du politiquement correct sur des cibles très larges et familiales, les séries doivent rassembler le plus possible et donc être le plus consensuelles possible (Camping, Joséphine, L’homme de la situation ou encore les collections de low concepts du service public : pour en savoir plus sur la différence entre un low et un high concept, je vous renvoie au cours Le high concept, ou comment vendre son premier scénario à un producteur.).
  • Pour les acteurs, l’investissement est différent. Le faible nombre d’épisodes fait qu’ils peuvent se trouver d’autres projets ailleurs, la conséquence étant parfois que leur présence sur la série n’est plus assurée lors de la saison 2 si celle-ci est programmée trop longtemps après la première saison.
  • Le modèle du câble US quant à lui est essentiellement incarné par Canal+ et Orange Cinéma Série (dans une proportion moindre) qui produisent des séries sur un modèle proche du cinéma ou carrément inspirées de l’international avec le système des coproductions où le savoir-faire est importé. Des chaînes à faible audience comme Arte ou France 4 se permettent plus de libertés éditoriales mais restent encore sur des volumes confidentiels pour l’instant.
  • Pourtant, on sent un nouveau frémissement :
    • Avec les productions Besson qui pleuvent sur l’ensemble du PAF,   
    • les programmes à haute valeur artistique de Canal+ ou encore d’ARTE pour le registre série événement,
    • ou encore quelques tentatives du service public avec Les hommes de l’ombre ou même Caïn, inspiré par Dr. House,
    • le développement en volume des formats courts avec Scènes de ménage, Nos chers voisin, En famille mais aussi Vestiaires, la Minute vieille, etc.
    • une nouvelle création télévisuelle pointe. Reste à espérer que ce nouveau modèle perdure.
  • À grands traits, on voit ainsi la différence des deux côtés de l’Atlantique même si la comparaison brute n’a pas de sens. Elle permet juste peut-être de comprendre ce qui va nous arriver dans quelques années. 
    • Les Américains ont bâti une industrie ad hoc, inspirée par le cinéma au départ mais vite autonome, où dominent quelques figures : le studio, les agents, le showrunner…
    • Les Français eux, cherchent encore de nouvelles façons de faire sans brusquer l’organisation mise en place. Espérons que toutes les avancées actuelles débouchent sur un modèle original qui nous permettent à notre façon d’industrialiser la fiction française et de mettre enfin l’auteur au centre du processus créatif.

Pour apprendre vous aussi à créer une série efficace avec le cours écrire une série tv, les quatre ingrédients d’une bonne bible de série.

Polémique: la presse spécialisée série TV est-elle fiable?

Un malaise s’empare de moi à la lecture de certains papiers de la presse dite « spécialisée en fiction TV » ces derniers temps. Face aux scores sans appel des fictions US sur nos écrans (cf. Mentalist, qui a battu son record et fait 9,5 millions de téléspectateurs), certains journalistes de nos grands journaux nationaux font preuve d’une véritable bravoure, ou de cynisme peut-être, quand ils se mettent à soutenir nos productions nationales coûte que coûte, et ce, parfois en dehors de critères de fond.

À tous les festivals, c’est l’école des fans

Les critiques sont DITHYRAMBIQUES ; puis quand arrive la diffusion, les perceptions et les scores sont décevants, à quelques exceptions près. Exceptions qui, souvent, ne sont pas celles qu’on voudrait voir. Face aux bons scores de Joséphine, Victoire, Camping et autres séries « populaires » de TF1 ou de M6, il n’y a plus personne pour tenter d’expliquer pourquoi le public est au rendez-vous, malgré la faiblesse artistique de ces projets. Pourquoi ce soutien aveugle à une certaine fiction française seulement, celle du service public et autres assimilées ?
Les mots de certains ne sont jamais assez durs pour critiquer telle ou telle série américaine : décevante, prévisible, etc. En ce qui concerne certaines de nos fictions au contraire, c’est à peine si l’on entend des bémols. Je me suis amusée à faire un petit récap des derniers papiers sur Caïn par exemple, la nouvelle série de France 2, que j’ai regardée avec un mélange de plaisir et de déception (cf. mon billet sur les problèmes de narration de cette fiction à la française). Voici le résultat :

  • Le Figaro —Caïn, un flic intouchable par Gilles Boussaingault, émet une toute petite réserve : « Pour pallier son handicap, il joue d’une insolence et d’une provocation permanentes, servies par Bruno Debrandt dans le rôle-titre, qui trouve un ton juste et parvient à ne pas en faire trop. Heureusement, car, très vite, on pourrait sentir, avec ce héros solitaire et ironique, un désir, volontaire ou non, de copier le Dr House. »
  • Télérama —Mais qui est Caïn ? par Isabelle Poitte , évoque aussi « Le caractère du docteur House, le génie de Columbo et le handicap de l’Homme de fer… Rien de plus facile que de réduire Caïn, flic en fauteuil roulant et héros d’une nouvelle série, à ses sources d’inspiration américaines. Sauf que l’enquêteur marseillais, subtilement incarné par Bruno Debrandt, déjoue le piège de la copie pour imposer son style, entre sensibilité, aigreur et humour caustique. »
  • Le Monde Télévision —Caïn par Christine Rousseau, fait de même : « Si l’on peut regretter la faiblesse de l’intrigue, lors du premier épisode, celle-ci prend peu à peu de l’épaisseur et de la complexité dès les volets suivants (8 × 52 minutes). Sans atteindre cependant celle d’Engrenages, où officie également Bruno Debrandt, qui démontre avec brio grâce à ce nouveau rôle toute l’étendue de son jeu. Au point de nous faire oublier par endroits son handicap. Ou, tout du moins, de faire de ce personnage un héros presque « ordinaire ». À ce titre, Caïn est une vraie et belle réussite. »
  • Le Parisien —Formidable, ce flic en fauteuil par Carine Didier, qui conclut « À défaut d’intrigue forte dans les premiers volets, le jeu de chien et chat du duo d’enquêteurs est aussi jubilatoire que les répliques du flic, attachant et désarmant. »

Je passe sur les innombrables sites dédiés aux séries et autres éditions web de journaux régionaux qui se contentent de reprendre point par point le dossier de presse laudatif du projet, (comme Téléloisirs, La Montagne, Terrafemina etc.) à telle point qu’on se demande si les journalistes ont bien vu la série. Il faut chercher un peu pour trouver d’éventuelles critiques comme :

  • Le monde des séries —Caïn en roue libre par Pierre Sérisier : « Sa paraplégie n’est finalement qu’un prétexte manquant cruellement d’originalité. On aurait pu imaginer bien d’autres choses comme fondement à son mauvais caractère et à sa détermination à continuer d’être flic. »

Le même consensus, peut-être même plus exacerbé, sévit ces derniers jours pour louer Ainsi soient-ils, la nouvelle série d’ARTE, où nous passons carrément à une forme religieuse de journalisme, de type vous-pouvez-mieux-faire-mais-l’idée est-tellement-innovante-qu’il-faut-continuer. Est-ce que cet encouragement s’adresse aux auteurs ou au diffuseur ?

  • Le Monde Télévision —Ainsi soient-ils : sacrée série ! Par Guillaume Fraissard et Stéphanie Le Bars : « En dépit de quelques maladresses et invraisemblances, Ainsi soient-ils porte un regard juste et touchant sur ces personnages hors norme. Il aurait été facile de les enfermer dans la caricature ou de les plonger dans une atmosphère nimbée de passéisme. Les huit épisodes montrent, au contraire, des hommes de foi ordinaires et contemporains, d’impeccables héros d’une série qui ne manque pas de grâce. »
  • Le Point —Ainsi soient-ils, la foi ne connaît pas la loi par Charlotte Pons : « Pas question d’angélisme, donc, dans cette série produite par Arte. Si ce n’était la fascination exercée par la vocation – qui choisit d’être ordonné prêtre aujourd’hui ? -, elle pourrait se dérouler dans n’importe quelle communauté. Car plus que la question de la foi – comment la vivre, jusqu’où, comment l’accommoder avec sa nature humaine, avec la société -, elle pose celles de la connaissance de soi, de l’acceptation de ses limites et de la difficulté à vivre ensemble. »
  • Le JDD —Arte prêche pour sa paroisse par Adeline Fleury : « Entre espoirs et doutes, corps et esprit, paroisses désertées et intrigues de pouvoir Ainsi soient-ils offre une immersion inédite dans les couloirs de l’Eglise. »
  • Le blog Tête de série —Ainsi soient-ils, amen par Pierre Langlais : « Où même les séries qui peuvent s’améliorer comme Ainsi soient-ils sauront nous donner envie de leur donner le temps. » Malgré quelques bémols « Il y a des longueurs, des lenteurs, des silences, qu’il faut apprendre à embrasser. On ne regarde pas une série comme celle-là pour ses scènes d’action. »
  • Le Monde des séries —Ainsi soient-ils, l’aveu de tolérance par Pierre Sérisier : « Quelques petites maladresses subsistent au long des huit épisodes, mais l’ensemble dévoile une réelle exigence de qualité dans la production, la narration, le suspense et les dialogues. Ainsi Soient-Ils procède d’une ambition qui s’est donnée les moyens de parvenir à son but. Cela est suffisamment rare dans les oeuvres télévisuelles françaises pour que l’on s’en réjouisse. Amen. »

L’éloge est unanime à part peut-être Le Figaro, mais il fallait bien chercher :

  • Le Figaro, –Les dix séries phares de la rentrée par Muriel Frat et Constance Jamet : « La crise des vocations, les difficultés financières, l’isolement des prêtres mais aussi les espoirs de jeunes gens prêts à servir Dieu forment la trame de cette série pour le moins originale mais qui tombe dans la caricature dès qu’elle aborde la richesse de l’Église. »

Je ne sais pas si la série d’Arte est de bonne facture ou pas, mais à lire l’ensemble de ces articles élogieux, mon sang se glace. J’ai peur de me faire avoir comme pour Caïn.

Faut-il vraiment enfoncer dans le crâne des téléspectateurs la fiction française avec un tel matraquage marketing soutenu par une presse qui veut faire œuvre de salut public, vantant certaines de nos productions nationales à coups de « cette fois-ci c’est la bonne » ?


Certes, personne ne souhaite tirer sur l’ambulance, mais comment retenir les leçons de nos erreurs pour nous améliorer autrement ? Il semble en tout cas que la campagne promo ait marché : Ainsi soient-ils a dépassé les attentes et battu les records de la chaine, Caïn se maintient à un niveau correct. J’attends tout de même la suite des audiences pour ne pas crier victoire trop vite comme pour Inquisitio.
Le public français est éduqué. Il regarde en masse la meilleure fiction au monde qui, même lorsqu’elle est objectivement ratée, plane au dessus du niveau moyen de notre fiction nationale avec une facilité déconcertante. La rareté de l’offre de la fiction hexagonale ne doit pas nous faire prendre non plus des vessies pour des lanternes.
Les qualités intrinsèques d’une série récurrente resteront toujours sa capacité d’addiction, ses intrigues bien menées, son rythme, l’originalité de ses personnages, etc. Une thématique innovante ou encore un bon casting ou une déclaration d’intention ne seront jamais suffisants. Pour vous exercer à créer une série, n’hésitez pas à visionner le cours écrire une série tv, les quatre ingrédients d’une bonne bible de série.
Bien qu’habituée à cet incessant florilège d’auto congratulation, pas née de la dernière pluie, je continue pourtant de m’étonner. Pourquoi vouloir à tout prix nous faire passer des œufs de lump pour du caviar ? Il n’y a rien de mal à manger des œufs de poisson et je crois que le téléspectateur sait ce qu’il a dans son assiette. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas célébrer les réussites pour ce qu’elles sont. J’aimerais ainsi entendre plus de réelles critiques positives, c.-à-d. sur des critères légitimes. Avons-nous simplement envie de voir la suite ? De savoir si le personnage principal va s’en sortir ?
Dans un monde où la fiction franco-française vit encore trop sur d’anciens automatismes, il est certes important de saluer les initiatives innovantes. Mais de là à travestir la réalité, je crie au holà.

Cela pose aussi bien sûr la question des critères d’analyse d’une bonne série

Lesquels retenir ? Je pencherai pour ceux des téléspectateurs.
Si de bonnes audiences ne sont pas forcément la preuve d’une bonne fiction, l’inverse est rarement le cas (à moins que ce ne soit au final qu’une question de puissance de feu marketing !). Et vous, qu’en pensez-vous ?

Le match Dr. House – Caïn ou les problèmes de narration des séries françaises

J’ai vu les deux premiers épisodes de Caïn : sur le fond, pas vraiment de surprise, on nous vend bien un sous Dr House, comme si un handicapé en TV ne pouvait plus avoir qu’un seul type de personnalité (différents visages du handicap ont émergé pourtant depuis Né un quatre juillet en passant par L’homme de fer jusqu’à Scent of a woman !).


Au-delà des problèmes structurels de la fiction française qui conduisent à une pauvreté de la valeur de production (cf. notre chapitre sur le marché de la fiction française) du style massacre des postes d’ingénieur du son ou de directeur photo, de la musique, du générique etc., je m’interroge aujourd’hui sur une tendance de fond de la fiction française que j’ai observée et qui me laisse perplexe : la faiblesse de la narration à la française, autrement dit de la façon de raconter des histoires (ce que les Américains appellent le story telling).

En France, dès qu’on veut faire de la série de qualité, on semble s’exciter sur des ambitions thématiques plutôt que sur des bonnes histoires

Un bon exemple récent nous est donné avec Ainsi soient-ils dont l’ambition principale semble être de nous parler de religion et de L’Église de façon non consensuelle d’où la tag line finale du pitch d’ARTE : « Entre espoirs et doutes, corps et esprit, paroisses désertées et intrigues vertigineuses du Vatican, une immersion inédite dans les couloirs de l’église ». De même, à chaque communication, France 2 insiste plus sur l’originalité des sujets de société forts qu’elle veut traiter (cf. sa ligne éditoriale) que sur l’histoire réelle des personnages comme si la forme devait obligatoirement l’emporter sur le fond. Le problème est que cette stratégie marketing se retrouve aussi sur la façon d’appréhender le contenu.
Êtes-vous capable de nous raconter l’histoire de l’inspecteur Caïn, des capucins d’Ainsi soient-ils comme on peut le faire facilement pour un Gregory House, un Patrick Jane ?

Écrire un film ou une série, c’est avant tout raconter l’histoire d’un ou plusieurs personnages selon un point de vue personnel

Le Marketing utilise bien sûr tous les autres bons arguments pour nous pousser à la consommation.
Les techniques d’écriture des séries ne sont là que pour encadrer la narration d’un univers d’auteur qui devient visuel lorsque les mots tissent un ensemble d’images et de moments forts d’une trajectoire (cf. notre cours pour connaître : la technique du 1-2-3 et commencer à écrire) mais c’est souvent à ce niveau que le bât blesse pour la plupart de nos séries françaises quand les mots semblent déconnectés de l’image et que l’histoire racontée est pauvre comme dans Caïn.
Apprenez vous aussi à créer une série avec le cours écrire une série tv, les quatre ingrédients d’une bonne bible de série.

La preuve avec une démonstration en 1-2-3 : le match Caïn – Dr. House

  1. Faiblesse de la caractérisation du héros : House 1 – Caïn 0
    • Dans Dr. House, nous avons l’un des meilleurs médecins diagnosticiens au MONDE qui n’a pas réussi à accepter l’idée de perdre sa jambe et qui doit souffrir en permanence (d’où sa dépendance à la drogue) avec une jambe malade qui lui rappelle constamment cet échec (ou son ghost comme l’appelle les Américains). Ici, tout est lié, nous avons une backstory intéressante milkée (cf. notre chapitre pour connaître la notion de milking) sur sa faille. C’est parce qu’il est un « cocky & selfish asshole », un enfoiré égoïste et prétentieux, qu’il n’accepte pas de perdre sa jambe. Son accident le rend attachant mais on s’identifie surtout à lui car 1) il est le meilleur, 2) il est drôle et anticonformiste (fun).
    • Dans Caïn, la backstory est pauvre en soi : un flic dépressif et alcoolique veut se foutre en l’air et se crashe en voiture. Bien évidemment, pour remédier à ce problème d’attachement au personnage, les scénaristes lui ont crée un problème recurrent : Caïn s’est séparé de sa femme à contre-coeur car il ne supportait plus son regard sur son handicap (faille) mais il l’aime toujours et le lui dit d’ailleurs dès le pilote. Le problème c’est que cette faille est réversible (si sa femme l’aime à nouveau, le personnage n’a plus d’histoire). Caïn est égoïste et prétentieux mais l’était-il avant son handicap ? Pourquoi ne cherche-t-il pas d’ailleurs à reconquérir sa femme ? N’a-t-il rien appris de son accident ? CQFD. Caïn n’a que son handicap pour le rendre attachant, ce qui ne suffit pas.
  2. Absence de déclencheur : House 1 – Caïn 0
    • Dans House, le super médecin est défait par une maladie, dans Mentalist, le super médium surdoué est brisé par un fou qu’il n’a pas démasqué et qui a tué sa famille. Dans Caïn, le flic est défait par quoi exactement, on ne sait pas. En dehors même des qualités de mise en image, si la situation dramatique de base (c.-à-d. le déclencheur de la série, le « 1 » du 1-2-3) n’est pas intéressante, nous ne pouvons pas adhérer au personnage. Malgré son handicap, House est récupéré par son hôpital car il est le seul à obtenir des résultats sur les cas désespérés (cf. ses techniques de diagnostic). C’est le point de départ de la série qui justifie donc l’utilisation du personnage et lance la tâche.
    • Dans Caïn, nous n’avons pas de déclencheur. Pourquoi le flic est-il récupéré ? Jamais on ne nous démontre que Caïn est un flic exceptionnel (Les personnages insistent sur son taux de résolution élevée des affaires mais en soi, rien ne le démontre). 
    • Le handicap n’est pas la caractérisation du Docteur House et son handicap ne participe pas d’ailleurs de sa façon de pratiquer la médecine. 
    • Dans Caïn, ni le personnage, ni ses adjuvants ne nous permettent de comprendre pourquoi il est exceptionnel. Caïn est juste malin comme n’importe quel bon flic mais il n’est pas le meilleur flic de France, ce qui compenserait en quelques sortes son handicap et le rendrait INDISPENSABLE.
  3. Manque d’originalité de la tâche : House 1 – Caïn 0
    L’objet d’une série est de décrire une mécanique dramatique intéressante et originale grâce à la tâche (cf. la formation high concept pour trouver une licence de série originale)

    • Dans Dr. House, la tâche est originale (un twist de la méthode policière de déduction de Sherlock Holmes) et propose une mécanique dramatique en plusieurs détentes :
      • 1) par la caractérisation des qualités de diagnosticien : House n’a pas d’empathie pour ses patients et part du principe que tous ceux qui sont malades mentent.
      • 2) par la mise en valeur des adjuvants : sa petite équipe d’étudiants souligne en permanence dans leur relation mentor-élèves les qualités ci-dessus en l’aidant et en s’opposant à son manque d’empathie (conflits) (cf. notre technique de caractérisation des personnages avec la technique de l’opposition à quatre coins).
      • 3) par l’opposition forte de ses antagonistes : doublés à chaque épisode, le patient et la directrice d’hôpital dénoncent ses pratiques et tentent de lui mettre des bâtons dans les roues.
      • 4) enfin et surtout par le dispositif d’enquête lui-même (pour aller plus loin sur ce sujet, voir notre cours sur comment écrire une histoire policière et maîtrisez la tâche d’une série policière). House enquête de façon subversive voire illégale sur la maladie : il envoie ses élèves fouiller chez ses patients, provoque les défenses immunitaires des malades, etc.
    • Dans Caïn, nous n’avons pas de tâche originale :
      • 1) on ne comprend pas pourquoi le flic est différent des autres bons enquêteurs de la PJ : quelle est son originalité d’enquêteur à part son fauteuil ? La tâche fournie par le genre policier (ici, enquêter en fauteuil) est donc faible, car même s’il se permet des libertés avec le système, il n’a jamais à en assumer les conséquences. Les scènes de conflit sont faibles d’ailleurs avec sa hiérarchie (son patron EST son meilleur ami, comme si Wilson occupait la place de Cuddy) ou sa collègue qui ne reste jamais fâchée très longtemps.
      • 2) ses antagonistes sont faibles : il déteste les suspects et/ou les victimes (manque d’empathie) mais on ne sait pas vraiment pourquoi. Quel est son système de valeurs ? Quelles sont ses convictions originales sur les suspects, les victimes, etc. ? Choquer pour choquer de façon permanente finit juste par lasser.
      • 3) le dispositif du duo policier est classique (cf. comment construire le « 2 » d’une série) : Caïn enquête en fauteuil roulant comme il enquêterait s’il n’en avait pas au fond. L’ensemble des situations dramatiques liées à son enquête (possibilité de conflits) sont donc pauvres et le moteur dramatique de la série cale dès le départ (il y a par ailleurs un manque de crédibilité des enjeux évidents : Caïn risque-t-il sa vie dès qu’il met une roue dehors ? NON. Caïn risque-t-il de se faire virer ? NON. Caïn va-t-il récupérer sa femme ? Nous ne nous y intéressons pas car le personnage n’est pas assez attachant (pour en savoir plus, inspirez-vous de notre conseil gratuit sur comment installer des enjeux humains dans vos histoires).

Que retenir ?

Le match est ainsi sans appel, Dr. House 3 – Caïn 0.
Est-ce que Caïn est pour autant une mauvaise série ? Peut-être pas mais il nous reste comme un goût de déception.
C’est d’ailleurs ce que nous révèlent les audiences : 3,56 millions en moyenne la première semaine (14,3% de pda), en baisse la deuxième semaine avec 3.2 millions de moyenne, pour 13% de pda, encore en baisse la dernière semaine avec 2,8 millions en moyenne, pour 11,7% de pda. Pas catastrophique mais pas exceptionnel non plus, surtout que la série a perdu 700 000 spectateurs entre le début et la fin de la diffusion.
Caïn a semble-t-il trouvé son public et a priori a gagné sa saison 2. Espérons qu’elle nous propose par la suite, autre chose qu’un Dr. House amoindri et à roulettes. Qu’en pensez-vous ?

Rentrée télé : les chaînes jouent la sécurité

Médias, ton univers impitoyable ! Comme chaque année à la même époque, les espoirs sont grands de voir les choses changer : enfin de la qualité, de l’artistique, de l’industrialisation raisonnée, bref de la nouveauté en somme comme je l’évoquais dans un billet précédent dédié à la rentrée audiovisuelle mais à bien y regarder, les choses ont-elles vraiment changé ?


Cette année, les signaux avertisseurs de changement ont été nombreux :

  • pour la première fois depuis des décennies, le « 20 Heures » de France 2 a dépassé celui de TF1 ;
  • cette année Canal+ s’offre D8 et D17, deux chaînes sur la TNT gratuite, pour aller chercher ses concurrentes M6 et TF1 sur leur terrain en y mettant les moyens ;
  • le groupe Al Jazeera s’installe avec BeIN Sport sur les terres footballistiques et monopolistiques de Canal+ ;
  • six nouvelles chaînes débarquent sur la TNT dont HD1, la machine à fiction low cost de TF1 ;
  • une nouvelle loi sur l’audiovisuel public chargée de réformer les règles de notre bon vieux PAF arrive à l’automne avec au programme : réforme du mode de nomination des PDG des chaînes publiques et rapprochement du CSA et de l’ARCEP (l’autorité de régulation des télécoms) ;
  • un nouveau plan de financement de France Télévisions (à qui il manque toujours une centaine de millions d’euros pour boucler son budget) est annoncé ;
  • enfin, un nouveau patron pour l’AEF où cohabitent difficilement RFI et France 24, sera nommé…

Les cadres bougent mais les contenus restent parfois toujours les mêmes

Chez TF1, on attend que l’orage passe, France 2 et France 3 rêvent d’être libérées l’une de l’autre, Canal+ fait semblant de respecter les consignes du CSA pour financer D8, M6 veille à ce que la pub ne revienne pas sur FTV et nous retrouvons de bonnes vieilles constantes de notre univers audiovisuel. Ce qui ne change pas : petit tour d’horizon des valeurs sûres du PAF français :

  1. Des séries américaines en veux-tu en voilà
    • La fiction américaine a encore de beaux jours sur nos écrans : les derniers scores de Mentalist, Esprits criminels et autres Docteur House sur TF1 sont loin de faiblir et passent même largement au-dessus de tous les autres programmes. Ces séries sont solides et enchaînent les saisons comme un rouleau compresseur qui vient prendre presque l’ensemble de nos soirées et après-soirées. Dans les autres pays, le public préfère quand même sa fiction nationale, mais pas nous français, pourtant pays du cinéma (où seuls quatre petits épisodes de notre fiction française (chiffres 2011 du CNC) existent encore dans notre top 100 national des audiences face à 72 épisodes de fiction US).
    • En 2012-13 comme depuis une petite dizaine d’années, nous retrouverons donc tous les blockbusters US : Sur TF1 : Les Experts Miami – Las Vegas – Manhattan, Mentalist, Esprits criminels, Dr House, Grey’s Anatomy, New York Unité Spéciale, Fringe, Dexter, American Wives ainsi que des nouveautés comme Unforgettable, Person of Interest, Revenge, Breakout Kings, Dallas (la nouvelle génération des Ewing), Jo et Crossing Lines (coproductions internationales avec Jean Reno et Marc Lavoine).Sur M6, les diffusions des saisons inédites de Bones, NCIS et Desperate housewives sont d’ores et déjà annoncées, tandis que la chaîne mise aussi sur des nouveautés comme Le Transporteur, Terra Nova et Once upon a time. France TV n’est pas en reste avec : Cold Case et FBI portés disparus qui s’arrêteront fin 2012, et Castle le lundi soir. F2 complètera sa grille 2013 avec une nouveauté Rizzoli & Isles, une nouvelle série policière où l’enquêtrice Jane Rizzoli et le légiste Maura Isles traqueront les criminels de Boston. Les autres chaînes du groupe misent sur des séries anglaises et américaines : France Ô diffusera en clair Luther et poursuivra la diffusion de Sur écoute (saisons 4 et 5) et Treme (saison 2). France 4 laissera une grande place à Doctor Who (saisons 6 et 7) tandis que France 3 misera sur Mildred Pierce. Quant à Canal+ qui a fait sa marque de fabrique, elle reprend plus que jamais les séries de ses voisines US HBO et Showtime avec Game of thrones, Dexter, Damages et bien d’autres comme The big C, Mad men, Nurse Jackie, Weeds, Strike back us, Shameless et les indétrônables Simpson. Dans les nouveautés, on retrouve Homeland, Scandal, Prime Suspect, Inside Men pour les majeures. Enfin, Arte n’est pas en reste avec la diffusion de la saison 4 de Breaking bad et la saison 2 de The Walking Dead mais la chaîne culturelle s’est faite une spécialité des séries nordiques.
  2. Des bonnes vieilles séries françaises low concepts centrées sur des stars :
    • La fiction française traditionnelle reste encore majoritaire : malgré quelques nouveautés et quelques exceptions que nous détaillerons plus tard, la fiction française reprend ses bonnes vieilles habitudes de faire des lows concepts centrés sur des stars. Pour en savoir plus sur la différence entre un low et un high concept, je vous renvoie au cours Le high concept, ou comment vendre son premier scénario à un producteur.Sur TF1 : les séries usuelles reviennent avec Doc Martin (Saison 3), Mes amis, mes amours, mes emmerdes (Saison 3), Profilage (Saison 4), Section de recherches (Saison 7), R.I.S. Police Scientifique (Saison 8), mais aussi Nos chers voisins, Interpol, Camping Paradis, Week-end chez les Toquées, Joséphine ange gardien, Affaires étrangères, Alice Nevers, le juge est une femme, Julie Lescaut, Clem, Une famille formidable. Sur M6 : Victoire Bonnot, Scènes de ménages, En famille, Kaamelott… Sur France TV, il faudra aussi compter sur Fais pas ci, Fais pas ça (saison 5), Les hommes de l’ombre (saison 2), La Smala s’en mêle, Drôle de famille, Vestiaires, Deux flics sur les docks, Boulevard du palais, Dame de carreau, Nicolas Le Floch, Un flic ou encore Tango sur France 2, Un village français (saison 4), Famille d’accueil, Le Sang de la vigne, Commissaire Magellan, Enquêtes réservées et Plus belle la vie sur France 3…Même Canal+ joue la sécurité avec Engrenages (saison 4), Mafiosa (saison 5), Braquo (saison 3), XIII (saison 2), Maison close (saison 2), Borgia (saison 2), Hard (saison 3), etc. Apprenez vous aussi à créer une série avec le cours écrire une série tv, les quatre ingrédients d’une bonne bible de série.
  3. Bref, le règne de la continuité : mais pour combien de temps ?
    • Pas de pub sur France TV après 20h : malgré les tergiversations et le trou dans le budget de France TV, la publicité est belle et bien enterrée après 20h sur le service public, au grand ravissement de ses rivales privées M6 et TF1 qui comptent bien se réserver les annonceurs sur la tranche horaire la plus convoitée du PAF.
    • Rémy Pflimlin reste président du groupe France Télévisions et tentera de négocier un COM (contrat d’objectifs et de moyens) pour libérer le service public du diktat de l’audience tout en garantissant son indépendance financière (des licenciements et donc une grève sont encore à prévoir malheureusement). Beau challenge en l’état !
    • D’anciennes séries qu’on croyait éteintes reviennent : c’est le cas de la série française la plus exportée de tous les temps, Sous le soleil, qui fera son retour sur TMC (qui signe aussi pour une saison 2 des Mystères de l’amour).
    • Le cercle vertueux des territoires connus et assurés : De la télé-réalité et des jeux sur TF1 : nous verrons ainsi sans surprise le retour de Koh-lanta, Danse avec les Stars, The Voice, Masterchef et des émissions dédiées au coaching avec l’arrivée d’Estelle Denis à la tête de The Audience et au dating pour concurrencer directement M6 avec Coup de foudre au prochain village présenté par Julie Taton. Nous continuerons par ailleurs de voir sur M6 un ensemble d’émissions de coaching sur les mêmes thèmes : la cuisine (après Top Chef, Un Dîner presque parfait et Cauchemar en cuisine, M6 continue d’exploiter le filon culinaire avec Le meilleur pâtissier amateur) ; le couple (après L’amour est dans le pré, Adriana Karembeu présentera Pour le meilleur et pour le pire où elle tentera de réconcilier des couples en crise) ; l’immobilier (Stéphane Plaza rempile sur Recherche appartement ou maison et prend les commandes de J’ai décidé d’être heureux où des volontaires suivront des défis pour apprendre à cultiver le bonheur) ; le coaching parental (après Super nanny, Laisse-moi t’aider reprend le flambeau sur le sujet).Sur France TV on reste sur les mêmes crédos : Patrimoine – jeux – Documentaires – Magazines. Sur France 2, Nagui continuera d’animer des jeux et des journées spéciales seront consacrées à des événements ou soirées thématiques sur des sujets tels que l’école, la santé, le travail, etc. France 3 restera centrée sur les documentaires et les magazines (Mireille Dumas y animera des soirées événementielles sur des thèmes de société), France 4 cultive son positionnement de laboratoire et mise sur son trio jeu, magazine et divertissement tandis que France 5 s’occupera de philo et de documentaires, et France Ô de rêves exotiques.

Que retenir ?

Même s’il y a des nouveautés, l’ensemble du PAF semble jouer sur la sécurité. La crise est là, les budgets sont resserrés et les audiences s’érodent. C’est donc une politique vers un tout low cost qui s’annonce. De la fiction patrimoniale, du terroir, des JT et des émissions politiques et à quelques exceptions près, toujours les mêmes têtes pour servir la soupe sur France TV, du divertissement à l’américaine sur Canal+, de la TV-réalité-fictionnée et des fictions américaines sur M6 et TF1. Voilà pour l’essentiel de ce qui ne va pas changer. N’hésitez pas d’ores et déjà à partager avec nous vos commentaires sur cette rentrée télé bien conservatrice.

Inquisitio: les Français aiment le haut degré de fiction (si, si M. Le Postec)

Il y a trois semaines dans un billet dédié, j’annonçais triomphalement le succès mérité d’Inquisitio, nouvelle saga estivale de France 2 à gros budget qui raflait au nez et à la barbe de TF1 (et de Spielberg) la première place du podium des audiences de la soirée. Quatre épisodes plus tard, c’est la Bérézina : plus de la moitié des téléspectateurs ont déserté. Décryptage.

Des audiences en chute libre

  • Pour rappel, les deux premiers épisodes avaient attiré respectivement 4,3 puis 3,9 millions de téléspectateurs, avec une moyenne de 16,5% de pda. France 2 prenait ainsi une confortable première place devant TF1 qui lançait Smash, la dernière née des productions Spielberg. Il était donc sain d’applaudir des deux mains la performance du service public, qui avait su réunir un large pan d’audience autour d’un pari ambitieux, mené par de bons acteurs et une belle qualité de production.

  • Les semaines suivantes, la déconvenue avait été massive. La mini-série médiévale de huit épisodes affrontait de plein fouet la grosse série à succès américaine Esprits criminels sur TF1. Résultats : Inquisitio finissait quatrième des audiences (même derrière Des Racines et des ailes sur France 3).
  • Les quatre épisodes suivants ne retenaient l’attention que de 2,9 millions de fidèles en moyenne pour 12% de pda sur la première salve.
  • Le troisième prime captait 2,4 millions de téléspectateurs, soit 11.5% de pda en moyenne avec une nouvelle érosion des audiences. France 2 finissait bonne dernière derrière toutes les autres chaînes hertziennes.
  • Le final de la série, avec ses deux derniers épisodes, est à l’image du précédent prime (2,4 millions de téléspectateurs en moyenne, soit un peu moins de 12% de pda).
Inquisitio est déchue, l’échec de la diffusion du programme, entériné. La série est taclée dans la presse sur la simplicité de son scénario trop manichéen ou encore sur la caricature de Catherine de Sienne qui a inspiré la polémique avec l’Eglise catholique.

la chute d’Inquisitio : explications non convaincantes

  1. Ni la faute au traitement thématique :
    Je n’ai pas été convaincue par un article du Figaro : Inquisitio : mais pourquoi le programmer en été ?, qui expliquait que le divorce entre les téléspectateurs et la fiction de France 2 résultait d’une thématique trop sombre (qui aurait fait fuir les juillettistes en quête de divertissement après leur dure journée de labeur…)

    Cet élément d’explication m’avait semblé en totale contradiction avec ce qui fait la force de la fiction depuis sa création : une catharsis du quotidien par la force du récit. On accuse sempiternellement le traitement thématique alors que n’importe quel récit, s’il est raconté avec force par des personnages captivants, est capable de captiver n’importe qui d’entre nous.

    Comment alors expliquer ainsi le succès d’Esprits Criminels, série morbide par excellence, juste en face sur TF1 qui rafle en rediffusion, l’essentiel de son public à Inquisitio !
    Il y a quelque chose qui cloche sur le service public et son audience mais ce n’est pas son choix thématique. Bien au contraire, c’est justement cela qui avait appâté les curieux lors du premier prime.

  2. Ni la faute aux français et à leur supposé rejet de la vraie fiction :
    Je ne suis pas d’accord non plus avec Sullivan Le Postec qui explique cette semaine dans son article : « POLÉMIQUE — Après Inquisitio, France et fiction : le divorce… », l’échec d’Inquisitio par « la conviction solidement ancrée [NDLA : chez le téléspectateur] que le rôle premier de la fiction est d’instruire les masses. » « Aujourd’hui, le rejet de la véritable fiction est assez profondément ancré dans la culture française contemporaine, et encore plus dans celle des élites. C’est terrible mais nous sommes un pays qui a désapprit la fiction. Nous sommes dans un rejet global de l’imaginaire. » Je n’y crois absolument pas, pour les raisons suivantes :

    1. On ne peut pas justifier l’échec d’un film par son haut degré de fiction. Si les Français n’aimaient pas la fiction, cela se saurait. Non seulement ils aiment la fiction divertissante (cf. les scores mirobolants des comédies françaises, ciné ou TV, qui cartonnent malgré une qualité assez légère dirons-nous pour être poli), mais aussi aiment-ils l’imaginaire, le vrai, en un mot la SF ou le fantastique… StarWars, Le seigneur des anneaux et tant d’autres ont autant marché en France qu’aux États-Unis. Ne sommes-nous pas le pays qui a lancé Spielberg ? Après, qu’on ne sache pas bien faire de la fiction nous-mêmes, c’est une autre histoire ! Et que les critiques aiment ou non un genre, encore une autre&nbsp!
    2. S’il est difficile de produire un haut degré de fiction en France, ce n’est pas non plus parce que nous sommes dépourvus de talents. C’est tout simplement que notre modèle de production actuel n’est pas vraiment adapté, surtout en TV. La SF, par exemple, demande souvent un budget important. Par ailleurs, nous sommes habitués à voir de la SF américaine depuis 30 ans et leur niveau de production est aujourd’hui hors de notre portée. Du coup (ou coût), nous souffrons de la comparaison, et les producteurs et diffuseurs les moins courageux nous disent : on ne sait pas faire. Cependant, quand on y met le budget et le talent, ça peut donner Le cinquième élément, il me semble.
    3. La fiction historique n’a jamais eu pour vocation d’être un documentaire et les téléspectateurs français savent pour la plupart très bien faire la différence. Il ne serait venu à l’idée de personne de lancer une polémique sur la véracité historique de Gladiator, Troie, Robin des bois ou de la série de HBO Rome. On pourrait citer côté français Jeanne d’Arc ou même Les rois maudits. L’ambition de ces projets était claire : le divertissement. À aucun moment, ils n’ont suggéré incarner une quelconque vérité historique. La problématique est tout de même différente pour les films à thèse dont parle M. Le Postec, L’Ordre et la Morale de Mathieu Kassovitz ou Hors-la-loi de Rachid Bouchareb, parce qu’ils prétendent tous deux révéler une vérité, en contestant une histoire officielle. Il n’est pas étonnant qu’ils aient été accusés de sacrifier la vérité historique pour justifier leurs thèses subjectives. C’était bien l’objet de leur démarche.
    4. Je repose donc la question pour Inquisitio : si la polémique concernant des erreurs historiques a pris naissance, n’est-ce pas dû au marketing de France 2 qui a prétendu montrer une autre version de l’histoire officielle à ses téléspectateurs (contre la volonté même de son créateur et réalisateur Nicolas Cuche qui s’en est défendu dès le départ : « mon Moyen-Âge s’inspire parfois aussi bien des historiens que de la science-fiction et des jeux vidéo. Je l’assume »). À croire que Cuche n’a pas été entendu. Peut-être aussi est-il en cause dans son choix d’un mise en scène « réaliste ».
  3. Que retenir au final ?

    À mon avis, les téléspectateurs de France 2, à tort ou à raison, ont eu l’impression qu’on leur avait menti. Cette impression n’est pas liée au genre ou à l’arène de la série mais bien à des erreurs de dramaturgie (construction de personnages, traitement narratif, mise en scène) mais aussi à des erreurs de Marketing. Espérons qu’avec la fin de cette polémique, Inquisitio puisse avoir une deuxième vie en DVD, pour que cette fiction divertissante puisse être savourée en toute tranquilité. En attendant une saison 2 (que je lui souhaite), vous pouvez toujours aller vous divertir sur le site qui a surfé sur le buzz :

10 commandements pour apprendre à écrire un scénario (1/2)

  1. Tu n’auras pas d’autre dieu que la structure en « 1-2-3 »
  2. Tu aimeras tes personnages comme toi-même
  3. Tu apprendras à faire un déclencheur efficace
  4. Souviens-toi que l’objectif du protagoniste est toujours CONCRET
  5. Tu honoreras la logique et soigneras les détails


Les manuels pour apprendre à écrire un scénario sont pléthores, et certains ne manquent pas d’intérêts (cf. la bibliographie à la fin de cet article), mais cette semaine j’ai tenté de résumer modestement les règles qui, à mon humble avis, sont les plus importantes pour tout scénariste qui se respecte. Il ne fait pas de mal de les revoir de temps en temps et de se les ré-approprier autour d’un projet ; voici une sorte de « check-list » que je ne résiste pas à intituler : « Les 10 commandements du scénariste », par facilité mais aussi par jeu.

Tu n’auras pas d’autre dieu que la structure en «1-2-3»

Tout récit tient sur une structure ternaire (qu’il soit en trois, quatre, douze ou autant d’actes que vous voulez), ce que nous avons théorisé sous la forme du « 1-2-3 » (pour apprendre cette technique, commencez par la formation gratuite aux fondamentaux de l’écriture agile). C’est la base de toute histoire, un début, un milieu et une fin. Parfois, vous rencontrerez des structures en 2 actes (surtout pour les formats courts, type 26′) ou en 4 actes (de 60′ à 90′), mais globalement, votre histoire aura toujours besoin de poser une question dramatique centrale au début, pour y répondre lors de la résolution finale (climax). Entre les deux, pour éviter d’avoir une structure passive, celle où vous avez l’impression qu’il ne se passe pas grand-chose pour vos personnages, posez-vous toujours la question de savoir ce qu’ils FONT concrètement.

Nous en revenons ici au coeur de toute histoire, c-a-d, la TÂCHE. Nous vous avons donné une méthode pour construire des tâches originales (cf. son billet dédié : comment écrire un scénario sans peine avec la tâche), à vous de faire le reste. Plus votre tâche sera forte, plus votre structure sera facile à écrire. Je conseille même, avant de débuter toute histoire, de réfléchir en premier à la tâche de votre personnage : que va-t-il faire pendant 90 minutes ? Petite astuce : vous pouvez repérer facilement la tâche d’un film ou d’une série dans sa bande-annonce ; plus la tâche sera originale, plus elle sera mise en avant. Dans le générique de la série Alias par exemple, Sydney passe son temps à changer d’identité dans ses différentes missions, et c’est bel et bien la tâche principale de cette espionne. Prenez garde enfin quand vous construisez vos structures de vous jeter dans un déroulé trop évident, ou trop cliché. La structure est votre architecture de base, celle qui tient votre histoire par la main. C’est ce qu’il faut soigner en priorité. On vous pardonnera des personnages un peu clichés si votre structure est efficace et originale, beaucoup moins le contraire. Le public de cinéma ou de télévision est un public averti qui sait reconnaître quand on lui force la main. ▲

Tu aimeras tes personnages comme toi-même

Autrement dit, tu feras des personnages attachants. Pour ceux d’entre vous qui visualisent d’abord leurs personnages et pas la structure, dites-vous que lorsque vous aurez préalablement construit un 1-2-3 efficace, fluide et logique, vous pourrez vous concentrer sur vos personnages, bien entendu la partie la plus savoureuse (surtout pour une non structuraliste comme moi !), en étant assuré que votre public ne s’ennuiera pas grâce à votre moteur dramatique. Les américains parlent de « lovable » ou « likeable characters », en France, nous parlons d’empathie, vous pouvez dire aussi : touchant, intéressant, identifiant, bref vous avez saisi l’idée. C’est une des règles fondamentales : on ne suit pas un protagoniste s’il ne nous touche pas, s’il ne nous interpelle pas, si l’on ne peut pas s’identifier à lui d’une manière ou d’une autre. Cela ne veut pas dire que votre protagoniste doive être Monsieur sans défauts, ou bardé de qualités. Non, nous suivons un personnage principal ou protagoniste parce qu’il est celui qui rencontre le plus de conflits, le plus d’obstacles, et qu’il est le plus intéressant à suivre. En effet, une des règles en matière d’identification, c’est que le public s’identifie toujours au meilleur, c-à-d au plus intéressant des personnages. Il nous arrive ainsi de pouvoir nous identifier à des anti-héros (des personnages négatifs mais qui ont une qualité exceptionnelle ou qui doivent surmonter des obstacles et des failles qui les rendent d’une certaine manière séduisants et qui font écho à quelque chose de notre vécu). Attention donc aux personnages monoexpressifs, tout en négatif, où encore trop clichés… N’oubliez pas que c’est le protagoniste qui tient votre histoire, sans lui, nous n’avons aucune raison de la suivre. ▲

Tu apprendras à faire un déclencheur efficace

Le déclencheur est ce qui jette votre protagoniste dans une histoire, et le met en danger. C’est l’incident qui donne au héros son objectif, le force à entreprendre un voyage, à agir, et à définir un plan. Il est d’usage de le faire arriver au début de l’histoire (dans les 15 premières minutes pour un unitaire, dans le teaser pour un épisode de série), de manière à pouvoir développer une structure en trois ou quatre actes. Plus votre déclencheur sera fort et immédiat, plus le spectateur aura l’impression que l’histoire peut commencer. Si vous situez votre déclencheur trop tardivement, vous risquez de perdre l’attention de votre public qui attend avidement qu’il se passe quelque chose dans la vie de votre protagoniste.Dans Shrek, l’incident déclencheur survient quand son marais est envahi —le personnage n’a pas d’autres choix que de réagir et d’accepter une mission pour rétablir son équilibre initial.

Dans Piège de cristal, c’est l’arrivée de terroristes qui prennent en otage un building commercial et tous les employés d’une société japonaise, qui forcent le héros, John McClane, à leur résister pour prévenir les secours alors qu’il est désarmé et pieds nus… Bien évidemment, plus vous aurez posé les éléments essentiels de votre exposition (conflits éventuels, rapports de force, phobies, névroses, etc.) en amont, plus votre incident déclencheur prendra de l’ampleur. Tout est ainsi une question de dosage. Vous l’aurez compris, l’incident déclencheur est nécessaire à toute histoire, et plus il sera inattendu, ou effrayant pour votre protagoniste, plus vous aurez de chances d’intéresser votre auditoire. ▲

Souviens-toi que l’objectif du protagoniste est toujours CONCRET

Je ne saurais trop vous rappeler combien il est important de donner un objectif filmable à votre protagoniste. Sans objectif concret, un personnage aussi original soit-il, n’a pas d’intérêt ! Cela vous permet de structurer votre récit en mettant concrètement en place des conflits autour de cet objectif et en créant une tension dramatique par la mise en place d’enjeux importants pour votre personnage principal : que risque-t-il s’il échoue ?

Bien sûr, en fonction des genres, les objectifs seront plus ou moins réifiés (centrés autour d’un objet) : mettre la main sur l’arche d’alliance avant qu’elle ne tombe aux mains des nazis, comme dans Indiana Jones et les Aventuriers de l’Arche Perdue, n’est pas du même accabit que plaire à une femme, comme dans Intouchables, mais ces deux objectifs n’en auront pas moins été identifiés par le spectateur. Il sera renforcé en fonction de vos personnages, et de leurs failles : plus vous rendrez difficile l’achèvement de l’objectif, plus la tension dramatique sera grande. Enfin, si vous couplez votre objectif (par exemple s’enfuir quelque part) à une autre question dramatique (finiront-ils ensemble ?), vous renforcerez l’intérêt du spectateur. L’objectif est ainsi essentiel à la création de toute situation dramatique. ▲

Tu honoreras la logique et soigneras les détails

Le monde de votre histoire a beau être issu de votre imagination, il est néanmoins soumis lui aussi à la logique. Un rebondissement ne peut arriver dans votre récit sous prétexte qu’il vous arrange. Si vous avez besoin à un moment donné de telle ou telle situation, il faudra en avoir semé les prémisses au début de votre récit grâce à une technique, le « milking » (cliquez ici pour apprendre à écrire un scénario avec la technique du « milking »).Par ailleurs, avez-vous remarqué que les rêves sont parfois d’une étonnante précision ? Ce qui les rend fascinant c’est qu’ils contiennent des détails qui nous restent. Et bien, si l’on considère que l’art de la fiction consiste à plonger le spectateur dans un rêve de 52′ ou plus, il faut que votre récit soit aussi détaillé que possible.

Si vous posez un univers carcéral de haute sécurité comme dans Fortress, il faut donner à voir un univers crédible : définir des règles, une structure, des cellules blindées, etc. Faites des recherches sur un univers équivalent au besoin, mais il vous faut une longueur d’avance sur le spectateur. Surprenez-le avec des détails pointus qui montreront que vous êtes allés dans cet endroit auparavant (même s’il sort de votre imagination !) En anglais, on appelle ça des « specifics ». Ce sont toutes ces petites choses : des formulaires aux règles de sécurité, en passant par la justesse des uniformes ou encore des codes de langage, etc. qui font que l’univers que vous décrivez a l’air réel. S’il on a coutume de dire que l’on écrit bien que sur les univers que l’on connaît, c’est parce que justement, l’expérience remplace la documentation. Utilisez donc les arènes que vous maîtrisez, cela vous permettra de gagner du temps et d’y insuffler une expérience vécue qui ne trompera pas à l’écran. C’est particulièrement vrai pour la création d’une série TV, parce que son arène verra s’y dérouler un grand nombre d’épisodes (voir la formation scénario écrire et vendre une série tv). ▲

En espérant que ces cinq premiers commandements du scénario vous aideront à écrire, j’attends vos commentaires sur cette première salve pour vous apprendre la suite de cette check-list sacrée ;o) Merci de m’avoir suivie et à bientôt !

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