L’envie de raconter une histoire démarre souvent avec un personnage, c’est-à-dire avec quelqu’un d’imaginaire qui se comporte comme une « vraie personne » capable de suggérer de l’amour, de l’empathie, ou parfois de l’antipathie mais dont on a envie de connaître l’histoire et de savoir s’il va s’en sortir ou atteindre son objectif.
Il nous semble ainsi naturel de créer plusieurs types de personnages, mais l’une des astuces pour vraiment réussir à entraîner le spectateur avec soi est d’arriver à créer un personnage principal intéressant, emblématique en un mot, un PROTAGONISTE. Comment ? En utilisant la méthode High concept pour déterminer les caractéristiques principales de vos personnages (pour commencer la formation, cliquez ici).
Construire vos protagonistes avec des archétypes de fiction
Il existe ainsi plusieurs façons de créer un personnage (nous vous en donnons une sur ce blog avec la technique dite à quatre coins) mais beaucoup d’auteurs ont déjà écrit à ce sujet et parfois de façon très détaillée (cf. notre bibliographie). Bref, il y a autant d’idées sur ce qui fait un bon personnage que de pommes sur un pommier. Les traits et caractéristiques d’un personnage principal peuvent ainsi évoluer en fonction du genre, du format, du médium (visuel ou littéraire) et de sa tâche (cf. comment trouver le jackpot du scénariste) mais il existe une sorte de tronc commun pour confectionner un protagoniste (qu’il soit un personnage lambda du quotidien ou un héros de film d’action).
Pour cela, il suffit de vous reposer sur un ARCHÉTYPE (un modèle que nous connaissons et qui nous permet de savoir rapidement à qui nous avons affaire comme dans la vie) :
Dans cette optique, je vous propose de récapituler une série d’archétypes que nous avons l’habitude de voir. Contrairement aux idées reçues, même si l’archétype est un cliché, il ne rend pas un personnage fade ou non original. C’est parce que vous aurez choisi un archétype, une arène, une intrigue, un genre, etc. et l’ensemble des éléments indispensables à la confection d’une bonne histoire (cf. pack n°1 de la formation high concept) que vous obtiendrez un mix original.
L’enfer est dans les détails, il suffit de voir comment les différents héros type cités ci-dessous ont pu être déclinés à l’infini dans vos films préférés :
- Le héros. Il doit être admirable, avoir de l’intégrité, du courage, du charisme, de l’attrait physique, de la bonté, de la force, etc. Bien évidemment, dans cette optique, toutes les caractérisations inverses à ces adjectifs pourront s’appliquer à ses antagonistes (découvrez comment les façonner dès le « 1 » du 1-2-3). Vous avez reconnu le portrait robot de la plupart de vos héros de film d’action, des combattants d’une cause juste mais aussi des thrillers, de ceux qui se battent pour sauver leur vie injustement menacée. N’oubliez pas que pour être attachants, vos personnages principaux ne doivent pas simplement être décrits de manière physique mais vous devez aussi les mettre en scène grâce à des fonctions dramatiques telles que le déclencheur, la tâche, etc. Plus nous saurons qui sont vos protagonistes, ce qu’ils pensent du grand sujet qu’ils défendent ou pour lequel ils se battent, plus nous nous attacherons à leurs destins et nous aurons envie de les voir triompher de leurs obstacles.
- Le leader. Il doit être une personne de confiance, sur laquelle les autres et votre spectateur ou lecteur peuvent compter. Il vous faudra créer des scènes dédiées pour nous montrer comment votre personnage suscite de l’empathie, comment il est important pour sa communauté ou pour les autres. Quand vous arrivez à construire une personnalité que nous avons envie de suivre, pour laquelle nous vibrons quand il lui arrive des événements, vous avez remporté la partie.
- Le mentor. Dans un mimétisme par rapport au réel, vous pouvez confectionner un personnage réaliste, lucide. Il s’agit souvent d’un personnage de mentor (Clint Eastwood dans Million Dollar Baby, Morgan Freeman dans Seven, etc.). Nos émotions sont compatibles avec ce trait de personnalité car ce type de personnage fait appel à l’identification secondaire (pour comprendre cette notion, cliquez ici).
- Le Problem solver. Autre archétype américain à qui je ne trouve pas de traduction convaincante mais qui permet de fixer la confiance du public. C’est celui qui est capable de résoudre les problèmes. De nombreux grands flics sont fondés sur cet archétype.
- Le héros de comédie. J’ai consacré un billet entier aux archétypes comiques qui définissent des types de personnages principaux bien précis. Vous avez bien évidemment compris qu’en fonction des genres que vous utilisez, vous pouvez jouer sur différents archétypes (pour connaître les différents genres du scénariste, cliquez ici). Avant de commencer votre histoire, vérifiez ainsi toujours que celui qui la porte est bien identifiable pour le public et qu’il correspond aux attendus du genre que vous avez choisi.
- L’anti-héros. Beaucoup d’archétypes existent et il serait vain d’essayer de les lister mais vous pouvez aussi avoir des héros négatifs (ceux qu’on appelle les anti-héros et qui feront l’objet d’un futur billet). Ils ne porteront l’intérêt du spectateur que si vous leur donnez des attributs attachants. Si votre protagoniste est un loser, vous devez compenser ce trait peu attachant en nous révélant quelque chose de positif sur le personnage. Un objectif noble ? Un désir de changement ? Une action courageuse ? etc. Votre anti-héros peut se comporter de façon antipathique tout en étant à nos yeux très sympathique (c’est le cas du Dr. House par exemple comme je l’évoquais dans un buzz). Ainsi, même si vous choisissez un archétype d’enfoiré, ou du connard, vous devrez toujours veiller à nous le présenter de façon sympathique (que fait le personnage : sauve-t-il des vies, etc.). Vous multiplierez ainsi l’adhésion à un anti-héros transgressif et anti-conformiste (le héros moderne en somme) tout en le caractérisant de façon attachante.
Que retenir de cette première partie ?
- Quelque soit son archétype, votre protagoniste devra avoir une TRAJECTOIRE. Dans chacune de vos histoires, vous devrez définir ce qu’apprend votre protagoniste de son aventure. Par exemple, si vous définissez un héros, vous devez d’abord nous montrer sa faiblesse (sa faille). Plus cette faille sera grande, plus il aura de mal à atteindre son objectif, plus nous serons avec lui, plus nous aurons la preuve qu’il a changé à la fin de l’histoire quand il aura passé son climax personnel, c’est-à-dire le 3 de votre histoire (pour maîtriser cette fonction, cliquez ici).
- Attention à la passivité. Votre protagoniste ne peut pas être passif car c’est lui qui mène l’histoire. Même si au départ, vous en faites un personnage qui subit son destin, il vous faudra, au plus tard à la fin de votre -1-, lui faire prendre en main son problème et lutter pour son objectif. Vous avez une bonne illustration de cette technique dans Star wars épisode 4. Luke Skywalker ne se prend en charge qu’à partir du moment où il trouve une idée pour sauver la princesse Leia.
- Attention au manque d’empathie. La plupart du temps, lorsqu’on valorise un personnage, on utilise le mot attachant. En effet, sans empathie pour lui, il sera difficile au public d’être en contact avec votre protagoniste. Cela ne veut pas dire que votre personnage doit être sympathique à tout moment, mais vous devez le connecter d’une manière ou d’une autre avec nous. Le public doit ainsi être en mesure de voir le monde à travers les yeux de votre personnage et c’est votre travail d’établir les raisons pour lesquelles nous devons prendre soin de lui.
- Une excellente façon de le faire est d’utiliser ses adjuvants. Si quelqu’un se soucie de votre personnage, s’inquiète, l’admire, en a peur, etc., le public peut utiliser ce relais pour se connecter. C’est le cas au début de Training Day où le personnage d’Ethan Hawk a une scène rapide avec sa femme enceinte avant son premier jour de travail. Cette scène a été travaillée pour que nous ayons envie de voir Hawk rentrer chez lui car il a quelqu’un qui a besoin de lui.
- Une autre façon de le faire est d’utiliser son antagoniste. Même si votre personnage est antipathique ou mauvais, si vous créez un méchant encore pire que lui qui veut le détruire, nous aurons envie de voir l’anti-héros triompher quand même. C’est la stratégie Star Wars : quand Darth Vader s’oppose à l’empereur, nous sommes avec lui. C’est de même la stratégie employée dans Le silence des agneaux : quand le Dr. Lecter s’oppose au méchant directeur de prison, nous sommes avec lui, etc.
Lire la suite avec le billet suivant : Faire du personnage principal un protagoniste.