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ScriptDoctor.frBlog du scriptdoctorcomment écrire un scénario

comment écrire un scénario

La notion d’anti-héros: trois erreurs à éviter

Depuis que l’anti-héros a débarqué dans nos fictions au siècle des Lumières, des milliers d’étudiants et scénaristes se méprennent sur cette notion.



  1. Ne pas donner des compétences à son anti-héros
    L’erreur n°1 chez les étudiants qui sollicitent notre service en ligne d’aide à la création de fictions : créer un anti-héros aux traits plus négatifs les uns que les autres, pour le plaisir de choquer.Un personnage est attachant non en ce qu’il EST (Dr House est un connard égoïste), mais en ce qu’il FAIT (Dr. house est le meilleur diagnosticien du monde). C’est pour cette raison que nous raffolons de personnages a priori antipathiques : ce n’est pas tant leur immoralité qui nous séduit que leur habileté à échapper au carcan social et à ne pas payer le prix de leurs comportements rebelles. Attention donc à ne pas charger négativement un personnage sans démontrer ses talents d’une façon ou d’une autre.
    Comme n’importe quel héros, c’est ce que nous le verrons FAIRE qui sera important pour construire le coeur de votre récit (cette technique d’écriture s’appelle la tâche, ou le 2 du 1-2-3).

  2. Ne lui faire subir que des demis-échecs
    L’anti-héros est un personnage ordinaire et banal qui se définit par ses faiblesses (contrairement à un Rodrigue dans Le Cid par exemple, qui réunit toutes les qualités nécessaires à son statut héroïque). Mais même sur le terrain de l’échec, l’anti-héros est un héros caché. En effet, l’échec est LA technique du scénariste pour caractériser un héros classique ! Plus grand est l’échec, plus grande est la difficulté surmontée, et plus grande est notre empathie pour le personnage.
    Indiana Jones est le héros classique par excellence. Courageux, check. Compétences d’action hors du commun, check. Choisi de Dieu—voire immortel, check.Et pourtant dans les Aventuriers de l’arche perdue, il accumule les échecs. Il perd l’idole, il laisse Marion se faire kidnapper, il n’arrive pas à la libérer, il trouve l’Arche mais se la fait prendre, il menace de la détruire mais personne n’accroche à son bluff… Loooooser.

  3. Créer un anti-héros pour rompre avec la structure héroïque
    L’euphorie générale contemporaine pour les anti-héros n’a rien d’originale. Depuis le siècle des Lumières, l’idéologie des auteurs les poussent à prendre le contre-pied de la notion d’héroïsme classique. Dans l’Antiquité, le mot héros est synonyme de demi-dieu; il est en fiction une représentation idéale dans laquelle toute une nation se reconnaît, une sorte de champion.
    Turnus décide, à la fin de L’Enéide, d’affronter seul Énée : « C’est décidé : je vais me battre avec Énée, je souffrirai jusqu’à la mort toutes les duretés de ce combat ». (La classe, non ?)

    Mais si Zola ou les Nouveaux romanciers du XXe siècle n’ont pu déconstruire totalement ce statut héroïque, il faut s’y faire : le trajet héroïque est précisément le schéma constitutif de toute fiction. L’anti-héros est donc un héros comme les autres, Dr House ou pas.

J’espère que ce plan de route vous aidera à définir des anti-héros aussi magnifiques que Walter White dans Breaking Bad (« Yo ! Mr Whiiiiiiiiiite ! »). Et vous, quel est votre anti-héros favori ?

Une technique d’écriture pour bien finir son récit

  1. J’évite de caractériser un personnage par son physique
    Donner un âge, un sexe, un métier ou une coupe de cheveux n’aident pas à caractériser un protagoniste, du moins tant que ces éléments sont plaqués sur l’histoire sans en faire vraiment partie. (Certains vont plus loin en ajoutant un problème à gérer, comme la toxicomanie ou la mort d’un être cher, mais ils ne savent pas non plus comment utiliser ces caractéristiques pour donner de la profondeur à leur héros).

  2. Je dote le protagoniste d’une faille morale, et d’une seule
    Construire une histoire dimensionnée ne veut pas dire créer des personnages torturés de mille et une façons. Plus les traits de caractères de vos personnages seront clairs et lisibles, plus ces derniers seront universels et touchants. C’est le rôle de la faille morale.
    Un personnage place son travail avant sa vie de famille (un défaut commun dans notre société qui associe le succès au monde professionnel).

  3. Je détermine sa trajectoire
    La trajectoire de votre personnage est sa transformation morale au cours de l’aventure que vous allez lui faire vivre. Elle peut être positive ou négative, si vous n’aimez pas la happy end. Cette approche de la psychologie du personnage est la clé de voute d’un pan de la dramaturgie (cliquez ici pour voir la vidéo sur

10 règles pour écrire un bon scénario

Comment commencer à écrire un scénario ? Et surtout, comment écrire un bon scénario ? Voici dix conseils pratiques qui me semblent les plus importants à retenir pour se lancer et travailler le plus sereinement possible à cet objectif. Ces conseils vous aideront à faire le tri entre les fausses bonnes idées et celles qui méritent d’y consacrer plusieurs mois voire plusieurs années.


En effet, quand on est scénariste, des milliers de règles existent et parfois se contredisent sur comment écrire un bon scénario. Il n’y a qu’à voir la bibliographie et l’ensemble des conférenciers sur le sujet. Certains passent leur temps à bouquiner ces règles et n’écrivent jamais rien, quand d’autres les oublient et écrivent au kilomètre (c’est-à-dire mal). Certaines règles sont parfois motivantes alors que d’autres sont inhibantes ou compliquées. Mais au fond, toutes les règles doivent servir à se donner des points de repère. Pour être le plus efficace possible, nous vous proposons avec la méthode d’écriture High concept de simplifier à l’extrême les différents outils de dramaturgie à votre disposition.

  1. Écrire c’est réécrire.
    • Tout le monde a des idées, vous, moi, votre grand-mère ou votre coiffeur. Et si on faisait un film qui raconte l’histoire de X, je suis sûre que cela intéresserait les gens ? Cette phrase, vous l’avez peut-être entendue cent fois. La première différence entre un scénariste et un non scénariste est d’abord la capacité à écrire cette histoire. Tant qu’elle est dans l’air, cette histoire ne vous appartient pas. Si vous passez un mois enfermé chez vous à l’écrire, vous en devenez l’auteur.
      Alors, certes avoir des idées fait partie du métier, mais cela ne suffit pas. Pour savoir si vous tenez un film ou une série, il faut essayer de les écrire et de les réécrire encore et encore. C’est là bien sûr que la difficulté commence. Une bonne idée au départ peut s’avérer stérile au bout de quelques pages, tandis qu’un vague thème peut vous conduire à broder une épopée. Comment faire la différence ? S’il nous fallait écrire 120 pages à chaque fois qu’on a une idée de film, on serait vite épuisé ! Ce procédé est couteux en énergie et est peu efficace car il génère beaucoup de déchets et de découragement. Que faire ? (voir point ci-dessous)
  2. Écrire c’est créer un concept original.

    • Une idée en soi n’a aucune valeur. Elle appartient à tout le monde. D’ailleurs, plusieurs films peuvent parler de la même idée sans pour autant être similaires. Ainsi, pour commencer à écrire, il ne faut pas simplement s’arrêter au stade de l’idée, il faut pouvoir aller plus loin et la formaliser dans un document qui contient la plus petite unité d’histoire originale (et qui cette fois-ci peut se protéger par le droit d’auteur). Nous parlons ici d’un concept original. Un concept n’est ainsi pas seulement une idée, c’est une mise en forme ainsi qu’une combinaison d’éléments originaux (personnages, déclencheur, objectif, tâche) qui la rend unique. C’est d’ailleurs le point de départ idéal pour travailler une histoire. Avec le 1-2-3 (commencez votre formation en découvrant le 1 du 1-2-3), votre simple idée devient un concept avec un début, un milieu et une fin. Vous maniez des fonctions dramatiques simples (déclencheur, tâche, climax) qui vous permettront de voir votre histoire dans son ensemble. Bien évidemment, plus vous retravaillerez et réécrirez les phrases de votre 1-2-3, plus vous aurez exploré de voies, plus vous saurez où vous voulez aller. Vous vous serez par ailleurs économisé en sauvegardant beaucoup d’énergie mentale. Une fois votre 1-2-3 posé, vous pourrez ensuite attaquer votre continuité (et c’est encore une autre histoire…).

  3. Écrire c’est structurer encore et encore.

    • La plupart des cours sur le scénario font reposer une grande partie de l’enseignement sur la trajectoire des personnages, la maîtrise du thème ou du genre éventuellement et bien évidemment sur la maîtrise de la structure. Ce dernier point est d’une importance vitale pour avoir une vision claire, compréhensible de son histoire. Pourquoi insister autant ? Vous savez qu’il existe trente-six situations dramatiques et qu’il y a de bonne chance, surtout si vous avancez sur un low concept d’avoir une histoire qui ressemble à un moment ou à un autre à quelque chose de déjà fait ou de déjà vu. Une des façons de se démarquer est d’avoir un high concept bien évidemment (c’est ici pour maîtriser les techniques de brainstorming et créer un high concept), mais aussi et surtout une structure bien réalisée, cohérente et qui présente au moins une intrigue principale menée de bout en bout. Tout comme avec un bâtiment ou un pont, l’important n’est pas forcément l’allure mais le fait qu’ils tiennent debout malgré les conditions météo et qu’ils inspirent assez confiance pour nous faire nous y engager sans crainte. Plus vous avancez dans votre art, plus vous pouvez prendre des libertés avec les figures de base de la structure (cf. les scénaristes ceinture noire), cependant, plus votre structure est maîtrisée, moins vous prêterez au flanc de la critique. C’est une chose de ne pas plaire, mais avec une structure maîtrisée, personne ne pourra vous dire que votre projet est nul.
  4. Écrire c’est s’économiser.

    • Les meilleurs scénarios ne sont pas forcément ceux où il se passe énormément de choses avec des univers chargés et de la complexité à gogo, c’est même plutôt l’inverse. Quand votre structure fonctionne à l’économie et à l’efficacité, où chaque élément est assimilable à un domino qui fait avancer l’histoire et que vous ne pouvez pas l’enlever sous peine de faire s’effondrer tout le château de cartes, alors vous savez que vous avez atteint un raffinement et une perfection appréciable. Pourquoi faire de longs discours alors qu’un hochement de tête suffit ? Il vous faut ainsi toujours vous demander si chaque scène en vaut la peine. Pour cela, il suffit de s’imaginer en train de convaincre un producteur : est-ce que cette scène de train avec tous les décors et les acteurs mobilisés vaut la peine ? N’est-ce pas la même que la scène précédente pour le personnage ? En quoi est-elle indispensable à mon intrigue ? Imaginez-vous argumenter avec votre producteur qui doit s’assurer que chaque euro dépensé soit rentable. Tous les aspects d’un scénario sont simplifiables : le nombre de personnages, de décors, d’intrigues, etc. Pourquoi faire deux intrigues parallèles avec deux personnages qui ont la même trajectoire alors qu’une seule suffit ? Enfoncer le clou avec une redondance de scènes qui disent exactement la même chose peut nuire à l’impact émotionnel global de votre histoire. Mieux vaut alors un seul moment fort que plusieurs moments faibles !
  5. Écrire un scénario c’est utiliser la grammaire du cinéma.
    • N’importe qui peut créer un personnage qui ouvre la bouche pour nous parler de sa vie. Certaines personnes le font d’ailleurs avec un certain talent, elles décrivent très bien des situations drôles, poétiques ou déchirantes (dans un roman !). Mais les films et les séries sont d’abord et avant tout des supports visuels. C’est pour cette raison que le langage cinématographique a instauré des codes et des façons de nous montrer ce qu’un personnage pense ou ressent. Une des règles importantes à s’appliquer à chaque fois que nous devons écrire une continuité est ainsi d’écrire le plus VISUEL possible (cf. ce que les Américains appellent le « show don’t tell ». Il faut ainsi toujours se demander ce que va voir et entendre le (télé)spectateur. Quelles scènes puis-je créer pour mettre en valeur telle ou telle autre particularité ? Dans quel ordre mettre mes différentes scènes pour générer l’illusion d’une routine ou d’un long espace de temps ? Plusieurs outils existent : les ellipses (jouer avec les effets du montage), les effets de contraste, ou encore les dialogues, qui contrairement à l’usage que certains auteurs débutants en font, ne doivent jamais servir à l’exposition ou à apporter de l’information personnage (cf. notre cours pour étoffer votre palette cinématographique et découvrir les différents moyens de commencer un scénario).
  6. Écrire c’est travailler sur un matériau personnel.
    • Cette règle est très vraie et pourtant parfois stupide. Steven Spielberg n’a pas rencontré E.T. avant de créer le personnage ni des aliens avant de filmer Rencontres du troisième type et pourtant, ses personnages d’extra-terrestre nous paraissent aujourd’hui une référence. Pas besoin non plus d’aller sur la lune pour écrire à ce sujet ! Cependant, il est toujours possible de ramener son ignorance à sa propre expérience. Spielberg n’a pas rencontré d’extra-terrestre mais il sait surement quelque chose de l’isolement et de la solitude. De même, en fonction de vos genres de prédilection, vous pouvez vous appuyer sur votre compréhension de la peur, ou de la confiance dans la science par exemple pour écrire sur des sujets qui dépendent de ces valeurs. C’est parce qu’il est difficile de parler d’un sujet qui nous est complètement étranger, qu’il faut au maximum ramener ce sujet à une expérience personnelle. Grâce à cela, vous serez capable de fournir des détails pour rendre vos arènes vivantes et familières (apprenez la technique dédiée en maîtrisant vos arènes du récit). Plus vous aurez réussi à injecter du vécu (ce que les étrangers ne connaissent pas d’un sujet), plus vous aurez de la crédibilité pour instaurer un contrat avec le spectateur (cf. le contrat auteur-spectateur et les mécanismes de l’exorde).
  7. Écrire c’est créer des enjeux.

    • Une histoire ne sera intéressante pour un spectateur que si elle intéressante pour son personnage principal. Si votre protagoniste n’a rien à perdre ou à gagner dans son intrigue, il y a ainsi peu de chances qu’il réussisse à nous intéresser sur la longueur. Inutile de mettre un pistolet sur la tempe de votre héros pour le rendre intéressant, ou de donner à tous vos personnages des enjeux de vie ou de mort (surtout si vous n’êtes pas dans un film d’action) mais il est important que nous comprenions ce que risque votre personnage et ce qu’il a à gagner dans son objectif pour pouvoir apprécier sa trajectoire. Plus vos enjeux seront forts, plus votre histoire sera tendue, plus nous serons intéressés, plus nous aurons envie de savoir la fin.
  8. Écrire c’est rendre crédible.

    • La difficulté d’écrire de la fiction (quand on crée des personnages et des histoires qui ne sont pas réels) réside dans le fait de dire LA vérité quand même. Ainsi, bien que l’entreprise entière d’écrire de la fiction puisse être considérée comme un mensonge, elle est faite pour représenter quelque chose qui est la réalité, c’est-à-dire l’expérience humaine. C’est cette reproduction de la vérité qui va entrer en résonance avec le public et qui nous permettra de nous identifier (Cédric vous a montré d’ailleurs les 3 voies possibles d’identification en scénario). Si nous n’arrivons pas à nous identifier d’une façon ou d’une autre, nous ne pouvons nous attacher à l’histoire et en conséquence, nous nous en désintéressons. L’habileté consiste donc à FAIRE VRAI, à être crédible, à pouvoir faire germer dans la tête de vos spectateurs que si telle histoire se déroulait dans telle arène, elle se passerait probablement comme ça, même si elle se passe dans une galaxie très très loin, ou dans un monde fantastique ou encore dans votre quartier… Ainsi, gérer la capacité du spectateur à croire à votre histoire fait partie du travail du scénariste.
  9. Écrire c’est mettre son ego de côté (au moins pendant l’écriture).

    • Certains auteurs ne veulent plus toucher à un scénario après quelques versions, d’autres glorifient leur talent ou croient à un don et d’autres encore vouent un culte à la création comme s’il suffisait de créer un personnage (même original) pour faire un bon scénario. Écrire est un métier qui s’apprend parfois dans la douleur. On imaginerait pas un sculpteur s’arrêter à sa première ébauche, de même un scénariste doit pouvoir sans cesse remettre son canevas sur la table (dès avant la vente diffuseur parfois). C’est aussi l’enjeu d’un métier (plus que les autres peut-être) collaboratif qui associe plusieurs corps de métier de la production à la réalisation en passant par beaucoup d’autres arts et techniques qui ne se gêneront pour apporter leur pierre à votre édifice. Il y a toujours des aménagements à faire, des choix à décider, des pistes à trouver, etc. Déterminer vos limites sur ces sujets fait partie du travail (et il faut parfois savoir rester ferme dans la tempête), attention cependant à ne pas être trop rigide au risque de vous retrouver tout simplement …au chômage.
  10. Écrire c’est trouver des solutions.

    • Un scénario est un château de cartes qui impose de revoir l’ensemble dès qu’un élément doit être modifié (si ce n’est pas le cas, outre certains détails, revoir le point 4). Lorsque vous rencontrez un problème dans votre histoire qui vous empêche d’avancer, il est parfois tentant d’ajouter de la complexité avec des détails ou des nouveaux personnages. Comment tel personnage peut-il savoir ça à ce stade de l’histoire ? Que fait tel personnage pendant le meurtre ? Ce genre de pensée logistique peut rendre fou et conduit souvent à une complexification des intrigues. L’important est toujours de reprendre la base : vos personnages, leurs archétypes et leurs systèmes de valeurs : quelles sont leurs compétences ? leurs back story ? Leurs pensées sur telle ou telle valeur ? Ne pas oublier ainsi que la réponse à un problème vient souvent du personnage et du point de départ de toute histoire, son déclencheur.

En espérant que cette petite check-list vous serve de boussole, n’hésitez pas à nous donner ainsi vos propres règles dans les commentaires pour partager avec nous vos convictions sur les principales règles à prendre en compte pour écrire.

Créer une histoire: une note sur l’intention

Spécialisé dans la spiritualité zen autant que dans les films d’action, Marc-Olivier a gentiment accepté d’animer sur notre blog un cycle 100% original, dédié à la problématique complexe du thème d’un scénario. À raison d’un chapitre par mois, vous apprendrez à ses côtés comment utiliser les techniques de la méthode HIGH CONCEPT sans jamais perdre le sens de votre histoire ou votre univers d’auteur en route. Bonne lecture, bande de veinards ! ;o) Cédric

LA TYRANNIE DU SENS

de Marc-Olivier Louveau

Avant d’écrire une histoire, il faut connaître le SENS de cette histoire.

Sens (nom masculin — latin sensus) : signification.
Certains vous diront que le sens est intrinsèque à l’histoire. D’autres vous diront que pour les messages, il y a la poste. Moi, je vous dirais seulement qu’en matière de scénario (et c’est aussi valable pour d’autres types de narration), il n’y a rien sans le sens car tout dépend de lui… Le choix de l’histoire, la structure, les personnages, la psychologie, les histoires secondaires, les charnières dramatiques, les objectifs, les sous-objectifs, la scène centrale, les lieux, les décors, les costumes, le casting, le choix du support de filmage, la lumière, la musique, le montage, le traitement des images : le sens détermine tous les choix dans le processus de création d’un film.Tout ce qui le compose, jusqu’aux plus petits détails, aura été pensé pour totalement l’exprimer.
Il est donc impératif de savoir ce que vous voulez dire avant de commencer à écrire une histoire, même si elle est tirée d’un fait réel. C’est incontournable. C’est long, fastidieux, mais tellement important. Tout se passe tellement mieux après.
Action !

Une bonne façon de procéder est de raconter son histoire en deux phrases, qui répondent à deux questions : Quoi et Pourquoi.

  • Quoi ? exprime l’action du film, la dramaturgie. Ce qui se passe ;
  • Pourquoi ? exprime la psychologie de l’action, la thématique du film.

Pour exemple, le plus simple possible :

  • Je sors fumer (action).
  • Pourquoi ? (le sens de l’action). Parce que… je suis en manque, j’ai un rendez-vous avec le soleil, c’est le seul moment où je peux voir les jambes de la secrétaire asiatique, je n’aime pas fumer à l’intérieur, on vient de m’apprendre que j’ai le cancer du fumeur, j’ai toujours soif, parce que c’est là que j’élabore l’assassinat de ma femme…

Autant de possibilités pour une même action d’avoir des sens différents. Autant de possibilités de raconter une histoire.
Pour appréhender toute l’action d’un film, qui comme on le sait, doit être aussi une seule action, un seul mouvement (voir le cours vidéo Comment écrire un scénario sans peine avec la tâche), le travail est le même.Vous voulez raconter l’histoire de quelqu’un qui va tout sacrifier par amour. L’histoire de quelqu’un qui risque tout pour la gloire. L’histoire de quelqu’un qui décide de braquer une banque. L’histoire de quelqu’un dont la quête de pouvoir le détruit, L’histoire de quelqu’un qui devient tueur en série. L’histoire de quelqu’un qui doit trahir son père. Vous devez trouver un sens à cette action qui sera constituée elle aussi d’une multitude d’actions et de sens.

Pourquoi une chose est-elle faite ?La réponse se trouve naturellement du côté de celui qui l’exécute. Tout nous ramène donc à la psychologie du personnage. Pourquoi agit-il ainsi ? Qu’est-ce que ça signifie pour lui ? Qu’est-ce qui se joue en lui ? Pourquoi cette transformation ? Voilà les réponses fondamentales auxquelles il faut répondre.

Nous verrons plus tard que c’est à ce niveau que l’émotion d’une histoire se joue. La psychologie du personnage principal confrontée à celle des personnages secondaires, dans une situation conflictuelle (l’action), sera la source principale de l’émotion de votre histoire.

Le choc des enjeux humains crée l’émotion d’une histoire.

Les enjeux émotionnels des hommes et des femmes : l’amour, l’affectif, sous toutes ses formes, tant positives que négatives.Que le sens d’une histoire est toujours lié à cette relation à l’amour : filiale, passionnelle, amicale, charnelle, haineuse, sexuelle, paternelle, fusionnelle, fraternelle, compassionnelle, spirituelle, maternelle, incestueuse, fratricide, psychotique… et à la relation que le personnage principal entretient et a entretenu avec elle : l’amour de soi.

Il est plus facile de partir d’une maladie pour en exprimer les symptômes, comme il est plus facile de partir du SENS d’une histoire pour en exprimer l’action.

On a vu qu’une même action peut prendre des significations différentes selon le sens qu’on lui donne. Ce sens transformant naturellement l’orientation de l’action. De la plus simple : je sors fumer, à la plus complexe : je fais le casse du siècle. L’action est donc toujours le symptôme d’une signification.

  • Un homme tousse.
  • Tousser peut être le symptôme de sa grippe, de son tic, d’un signal convenu avec des complices, de son « avalement » de travers, de son artifice pour se faire remarquer…

Derrière le symptôme (l’action), il y a toujours un sens, et il doit être présent dans toutes les actions du film.

« Je ne sais pas ce que je veux, mais je sais ce que je ne veux pas. »

Mieux vaut partir d’un cliché que d’y arriver, disait Hitchcock.

Il faut travailler par élimination. Repenser toute son histoire avec chaque nouvelle proposition, changer de personnage principal, raconter l’histoire à l’envers pour nous obliger à avoir une fin — le sens d’une histoire se révélant toujours à la fin (voir le cours vidéo Comment écrire la fin d’un scénario : le climax).

Choisir ce qui a le plus de résonance en nous, éliminer ce qui n’en a pas.

Surtout ne pas être pressé. Laisser les idées venir et les noter. Ne rien s’interdire. Lâcher prise. Attendre de trouver la formule qui s’imposera comme une évidence.

À force de travail, elle finira immanquablement par venir.

La recherche de sens est une remise en cause permanente et salvatrice. Elle permet de bousculer les fondements de l’histoire que l’on veut raconter. Elle permet de voir clairement ce que l’on veut dire. C’est une épreuve avec nous-même car c’est nous qu’elle bouscule. Elle nous oblige à sortir de nos retranchements, à fouiller les tiroirs qu’on aimerait laisser fermés, là où nous nous cachons encore.Car c’est en nous que sont les réponses. Dans notre vécu, nos peurs, nos traumatismes. C’est là qu’il faut puiser, à la source, là où il y a forcément du sens.

Même si cette recherche peut paraître jusqu’au-boutiste, la seule chose que l’on risque c’est de découvrir que l’on n’a rien à dire. Si heureusement ce n’est pas le cas, elle permet de mieux travailler, de ne pas s’enliser, de mieux concevoir, d’aller plus loin, d’être plus original, plus profond, plus créatif et surtout plus personnel.

« Ma pièce est faite, je n’ai plus qu’à l’écrire !» disait Boileau. Voilà où il faut en venir : n’avoir plus qu’à écrire son histoire.

Mais cela ne peut se faire avant d’en avoir trouvé le sens et d’en être intimement convaincu.

Cela ne peut se faire avant d’avoir repensé toute son histoire et les éléments qui la composent sous la direction de ce sens.

Tous les articles que je vous proposerai au fil des prochains mois traiteront d’un ensemble de questions scénaristiques autour de cette approche. En attendant, n’hésitez-pas à me poser vos questions dans les commentaires. À bientôt !

Dix conseils pour rendre votre héros de fiction emblématique

Comment créer un personnage intéressant ? Comment le rendre visuel ? Il n’est en effet pas tout de concocter intellectuellement quelqu’un inspiré de votre quotidien, de votre imagination ou de l’actualité, il faut aussi pouvoir le mettre en action, le conceptualiser dans une histoire avec un début, un milieu et une fin.

Nous avons vu plusieurs façons de caractériser un personnage avec des fondamentaux à respecter (profitez de nos conseils gratuits sur notre blog) :

  • définir un ou des archétypes
  • Trouver des traits secondaires de caractérisation cohérents
  • Maîtriser 10 règles pour écrire un antihéros efficace
  • Utiliser 4 piliers pour écrire un bon méchant

Il est ainsi important de préciser que tant que vous ne nous le dites pas clairement dans un dialogue ou dans une didascalie, nous ne pouvons pas comprendre la caractérisation d’un personnage. Cette dernière n’est pas INTUITIVE et ne peut-être sous-entendue ou implicite, elle doit apparaître clairement et le plus tôt possible par rapport à l’apparition de votre protagoniste. Mais comment donner l’étendue d’un personnage et son potentiel de façon immédiate quand vous nous présentez votre héros ?

Rendre vos personnages principaux vivants et capables d’imprégner l’imagination de vos lecteurs/spectateurs.

  1. Premier conseil qui peut s’appliquer à l’ensemble du travail d’un auteur sur un scénario. Prenez par exemple la phrase suivante : « Jean-Roger, des bagues en or plein les doigts, porte une veste à carreaux et est mal coiffé. Il vient de descendre d’une moto de grosse cylindrée ». C’est une caractérisation un peu plate. Pourquoi ? Parce que l’image associée aux mots est floue : nous ne savons pas vraiment à qui nous avons affaire même si nous avons quelques pistes. Qu’avons-nous appris sur le personnage ? Chaque mot dans un scénario doit être pesé car il impacte directement le budget de production. Vous devez ainsi vous demander si les centaines d’euros de maquillage/coiffure/costumes, etc. en valent vraiment la peine. En scénario, il faut d’abord vous astreindre à fonctionner à l’économie la plus absolue, sinon, changez de médium et optez pour le roman.
  2. Présentez-nous tout de suite l’archétype de votre protagoniste : un lecteur ou un spectateur doit avoir une idée immédiate de votre personnage la première fois que vous le présentez. Un « petit gros » n’est pas un archétype, un « grand blond » non plus et ainsi de suite. Par contre, si vous nous montrez un séducteur en action, ou un menteur pathologique, nous aurons une meilleure idée de ce à quoi nous attendre pour le reste du film ou de la série. Vous pouvez aussi bien entendu insister plus largement sur le don/talent spécial de votre protagoniste qui en fait un être singulier et intéressant (cf. Dr. House par exemple).
  3. Soignez son entrée : habituellement réservée aux personnages clés d’une histoire, plus une scène d’introduction est forte, plus votre héros sera mis en valeur. Il est donc intéressant de soigner particulièrement le moment de sa présentation au spectateur. Beaucoup d’outils vous ont été donnés dans le cycle high concept consacré aux au high concept et notamment la présentation d’Indiana Jones dans le deuxième opus de la trilogie.

    Dès le départ, nous le voyons en action et nous savons tout de suite qu’il est passionnant, courageux et génial. Cette technique n’est pas la seule façon de signer une entrée mémorable de protagoniste, vous pouvez aussi vous inspirer des Évadés (Shawshank Redemption) avec La voix off hypnotisante de Morgan Freeman qui nous présente le héros Andy Dufrêne de façon unique. Nous savons tout de suite à qui nous avons affaire et pourtant, le mystère reste intact : Andy est-il innocent ? La présentation du spectateur caractérise le héros et amorce aussi la question dramatique structurant le film. La réponse à cette question sera donnée à la fin.

    Ces quelques exemples vous montrent ainsi à quel point ce moment d’introduction de vos héros est clé pour le spectateur : non seulement, il est attendu comme un passage obligé, mais il validera aussi le contrat que vous passerez avec lui pour le reste du film ou de la série.
  4. Mettez-le en action : le meilleur moyen de présenter un personnage est de le montrer dans l’action (ce que les Américains appellent : « show, don’t tell ». Plutôt qu’un long paragraphe, même pertinent, préférez toujours une scène où il se passe quelque chose. Une action nous en dira toujours plus qu’une description si tant est qu’elle ait un intérêt pour votre histoire (cf. notre masterclass pour écrire une continuité dialoguée efficace). Car dans un film, comme dans la vie, la première impression est souvent la bonne. Si votre protagoniste est un enfoiré, il faut nous le montrer comme tel dans une action qui illustre cet archétype (hurle-t-il sur un autre personnage sans raison ? Contrevient-il aux convenances parce que ça l’amuse ?).
  5. Soyez cohérent avec le genre de votre histoire : « Miller, un cocaïnomane au nez proche du burn out » évoque une image qui correspond à la tonalité et au genre d’un film noir par exemple. Cette image ne serait pas autant adéquate pour caractériser un héros de conte, mais vous pourriez l’utiliser dans une comédie. Vos descriptions doivent ainsi nous donner un fort sentiment d’identité et de cohérence par rapport à l’histoire que vous racontez. Une des bonnes façons de le faire est d’utiliser le contraste. Si vous optez pour un corporate crime par exemple (qui parle des crimes dans le milieu de l’entreprise), pour mettre en valeur un personnage, il vous suffit de le différencier de son arène : « dans une grande entreprise du CAC au logo vert et bleu, au milieu des costumes-cravates à tons gris qui peuplent son open-space, Ramona, une jeune-femme souriante au look gothique (rouge à lèvre foncé, cheveux noirs parsemés de rayures roses vêtue d’un chemisier à dentelle rouge émergeant d’un corset parsemé de tête de morts argentés) joue de ses ongles noirs sur son ordinateur… ». Cette description nous fait tout de suite saisir le décalage de ce personnage avec son environnement et imprime dans notre esprit une image précise.
  6. Donnez un objectif à votre héros : un héros sans objectif (concret) est un héros passif et vous ne pouvez pas attendre de votre public de suivre un personnage passif pendant deux heures. Indiana Jones veut trouver l’arche d’alliance avant les Allemands, Luke Skywalker veut sauver la princesse Léïa, l’Inspecteur Harry veut trouver et punir les criminels, Dexter veut attraper et découper en rondelles des tueurs, etc. Par ailleurs, en donnant un objectif à votre personnage, vous définissez aussi ce qu’il est. Sauver quelqu’un, gagner de l’argent, obtenir une promotion sont des objectifs signifiants. Ils révèlent quelque chose de votre personnage. Plus ces objectifs seront profonds, durs à atteindre, mieux nous connaîtrons les personnages qui les poursuivent.
  7. Donnez-lui un secret : quand un personnage cache un secret, il est toujours plus intéressant que les autres car il rencontre plus de conflits, surtout s’il passe son temps à tenter de le dissimuler à d’autres.

    Le secret est aussi en lui-même révélateur des caractéristiques d’un personnage. Dans dans Nurse Jacky ou Dr. House, les personnages principaux cachent leur dépendance à une drogue, c’est aussi très révélateur de qui ils sont et ce qu’ils font. Un bon secret peut ainsi ajouter beaucoup de profondeur à un personnage, tout en vous donnant des éléments pour structurer du conflit sur la durée.
  8. Donnez-lui une faille : une faille définit un personnage en profondeur, car elle permet de comprendre ce que votre héros devra surmonter. Dans Black Swan, Nathalie Portman ne croit pas en elle-même.

    Mais plus qu’un simple défaut, son manque de confiance a été construit pour structurer le film en profondeur, car dans chaque action du personnage, cette faille est présente en toile de fond et fournit du conflit au personnage. À la fin, la danseuse finit par vaincre son ennemi intérieur même si elle le fait dans la douleur. Ainsi, pour qu’elle soit efficace, une faille doit revenir plusieurs fois heurter votre personnage principal qui devra atteindre son objectif tout en ayant résolu son problème fondamental. Cet outil vous permet aussi de creuser votre personnage tout en vous donnant des éléments pour trouver la fin de votre projet.
  9. Ajoutez des détails caractéristiques : pour donner de la profondeur à un personnage, nous avons vu qu’on pouvait lui ajouter certaines caractéristiques, bizarreries, traits de personnalité secondaires qui permettent de faire ressortir son archétype. Un détail peut parfois avoir de l’importance si vous parvenez à en faire un symbole de ce qu’est votre personnage.

    Dans Le Dîner de cons, le con joué par Jacques Villeret est sublimé par sa tendance à construire des maquettes en allumettes par exemple, ou par son amitié avec un autre con nommé Lucien Cheval, contrôleur fiscal bête et méchant. Ainsi, quand le détail devient métonymie de votre personnage, vous pouvez être sûr d’avoir trouvé une façon quasi unique de le rendre mémorable.
  10. Sélectionnez des éléments à mettre en avant de son histoire personnelle : personne n’aime voir un personnage raconter sa vie pendant une demi-heure, par contre, il peut être intéressant de donner du relief à un personnage en exposant quelque chose de son passé qui soit intéressant pour l’histoire. C’est ce que les Américains appellent la Backstory. Le secret pour le faire de façon naturelle est d’intégrer l’exposition du passé de votre personnage dans l’action pour ne pas ralentir le récit. Bien évidemment, le passé doit avoir un lien avec le présent. Dans Homeland, le personnage de Carrie, un agent de la CIA, cherche compulsivement à arrêter des terroristes.

    On apprend rapidement qu’elle est bipolaire et paranoïaque et comment elle a dû cacher sa maladie à son entourage professionnel. Le fait que son activité principale soit de chercher la vérité dans le mensonge permet donc à la fois de faire surgir les démons de son passé, tout en exploitant habilement sa caractérisation. Cet outil peut vraiment être très puissant pour propulser votre personnage vers son objectif, tout en l’obligeant à combattre ses failles présentes et passées. Avec cet outil, il vous faut prendre garde de vous servir des éléments passés pour faire avancer l’histoire que vous racontez au présent.
  11.  

Que retenir ?

En fonction des différents outils cités ci-dessus et il y en a encore bien d’autres à votre disposition comme le milking par exemple (cf. notre service d’analyse détaillée qui vous explique comment utiliser la technique du milking en scénario) que je n’ai pas détaillé ici, vous pouvez faire votre choix pour nourrir vos personnages principaux. Le mieux n’est ici pas l’ennemi du bien. Plus vous aurez pensé vos protagonistes, plus vous aurez intégré chaque composante de la liste ci-dessus dans leur caractérisation et dans vos intrigues, plus vous aurez de chances de les rendre emblématiques et intéressants pour un auditoire. Vous aurez saisi aussi la différence avec un personnage secondaire qui n’utilise que quelques-unes de ces caractéristiques alors qu’un protagoniste peut toutes les explorer. À vous de jouer.

Construisez l’antihéros idéal en 10 leçons

Tous les auteurs ont eu envie de s’aventurer au moins une fois aux frontières de l’empathie en s’attachant à écrire un personnage principal antipathique. Pourtant, bien loin de l’effet repoussoir qu’ils sont censés produire, certains d’entre eux sont devenus de véritables icônes actuelles. Décryptage.



Nous pouvons citer Dr. House, Dexter, Vic Mckey (The Shield), ou encore Walter White (Breaking Bad) pour les séries américaines, l’ensemble des personnages de Braquo, ou d’autres personnages des séries de Canal+ —mais c’est à peu près tout SAUF Caïn cette année sur France 2. Ainsi, à part la chaîne cryptée qui ose s’aventurer sur des terres non consensuelles, les autres chaînes françaises craignent ce type de personnages comme la peste (ce qui ne les empêche pas pourtant de diffuser les séries US qui les utilisent à grand renfort de pub).
Ainsi, il semblerait que ces personnages suscitent parfois plus d’intérêts que les autres héros classiques et que l’impact qu’ils ont sur le public soit décuplé ces derniers temps, surtout outre-Atlantique et outre-Manche. L’utilisation de personnages antipathiques devrait constituer une limite mais certains fans ne font que glorifier des traits de caractère peu reluisants, comme si la lâcheté ou l’égoïsme étaient des nouvelles valeurs à la mode d’un monde en crise. Mais le sont-elles vraiment ? Quelles sont les recettes pour garder votre personnage antipathique toujours au coeur de nos attentions ? Voyons plus loin…

L’antihéros, un personnage antipathique ET attachant

  1. L’antihéros nécessite une NARRATION spécifique
    • Il ne faut ainsi pas confondre ce qu’est votre personnage par rapport à son entourage fictif et ce qu’il est par rapport au spectateur. C’est ce que nous appelons l’identification secondaire. Ce n’est pas parce que la première qualité de votre personnage est d’être un connard avec les autres qu’il nous sera antipathique pour autant. La règle dans ce cas-là est de faire très attention à sa façon de le présenter au public grâce à la narration (façon de raconter votre histoire que les Américains appellent le story telling). J’évoquais justement la différence entre Caïn et Dr. House pour vous montrer qu’à personnage identique, les effets choisis de la narration rendent l’un incroyablement sympathique, alors que l’autre est simplement insupportable voire incohérent.
  2. L’antihéros est une figure de certains GENRES de cinéma
    • Prenons un exemple radical d’antihéros, avec le personnage de Walter White dans Breaking Bad.

      C’est un professeur de physique de banlieue qui s’improvise dealer de methamphétamine pour mettre à l’abri sa famille lorsqu’il apprend qu’il est atteint d’un cancer incurable. Bien qu’au cours des saisons, son cancer ne soit plus finalement la raison qui le pousse à rester hors-la-loi —il a pris goût au pouvoir et à l’argent—, il ne nous devient pas antipathique pour autant. Il est juste devenu un personnage complexe, difficile à cerner parfois, mais qui nous tient par l’empathie générale que nous avons envers lui. Et cela tient d’abord au genre employé par la série. Vous aurez ainsi remarqué que le CRIME est le genre par excellence de l’antihéros ! (cf. le cours dédié sur les 18 genres hollywoodiens qui servent à structurer vos personnages). D’autres genres ont été employés avec succès pour des antihéros (le genre action par exemple) mais il est important de bien choisir son genre avant de se lancer dans un personnage avec cet archétype.
  3. L’antihéros nous doit des explications : l’importance de la BACK STORY
    • Reprenons l’exemple de Breaking Bad où Walter est un homme ordinaire : c’est un petit prof de physique-chimie qui travaille très dur pour globalement zéro reconnaissance. Dès le départ, ce personnage nous touche car avons tous une empathie naturelle pour les personnages sous-valorisés par la société. De plus, Walter apprend au début de la série qu’il est atteint d’un cancer et qu’il finira sa vie prématurément. Quand il utilise les qualités que la société lui dénie (son génie de la molécule) pour contrarier le coup du sort et qu’il décide de fabriquer de la drogue pour mettre de l’argent de côté, son choix est discutable mais nous savons depuis le début que ce n’est pas un mauvais gars – juste un type normal poussé à bout.
    • C’est la même chose pour Dexter, un serial killer certes, mais qui a vu sa mère se faire tuer et qu’on a retrouvé baignant dans son sang lorsqu’il était petit. Cette information est assez forte pour nous permettre de contrebalancer la morale et relativiser en quelques sortes les mauvaises actions du personnage. 
  4. L’antihéros DOIT FAIRE DE BONNES ACTIONS malgré tout
    • Dexter ne tue que les méchants, Dr. House sauve les cas désespérés, Vic Mckey défend une prostituée, Walter White protège sa famille, etc… Si vous choisissez un personnage antipathique et que nous ne le voyons faire que des mauvaises actions, il ne sera pas convaincant et nous aurons du mal à nous associer à un personnage complètement mauvais. Par contre, si nous voyons un personnage méchant faire de bonnes actions, nous pourrons nous y attacher. Prenons le cas de Norman Bates dans Psychose. C’est un serial killer épouvantable, il a de graves problèmes avec maman, il prend la vie des gens qu’il est censé prendre en charge et il est sexuellement confus. Cependant, même s’il est maladroit, il est aussi un bel homme qui semble doux et anxieux, mais pas particulièrement dangereux. Il a même un peu de charme. C’est ce qui le rend sympathique pendant une partie du film du moins. Autrement dit, montrez-nous une mauvaise personne faire des mauvaises actions et ça donne un antagoniste, montrez-nous une mauvaise personne faire quelque chose de décent et c’est intéressant.
  5. L’antihéros a un DON particulier
    • Dexter est certes un tueur, mais un tueur spécialisé dans les rebuts irrécupérables de la société. Il a par ailleurs un système de valeurs (le code de Harry) qui le place dans la catégorie de ce que les Américains appellent le « Vigilante », c’est-à-dire, la version noire du super-héros. De même, Dr. House est un médecin hors du commun qui sauve les cas désespérés, Vic Mackey est le dernier rempart contre les bandits les plus féroces, Walter White est un génie de la chimie, etc. Vous aurez ainsi remarqué comme tous les héros sombres ont une aptitude particulière qui les rend uniques. C’est l’une des façons de les rendre intéressant. Donnez-leur une qualité hors du commun et nous aurons envie de voir comment ils s’en servent.
  6. L’antihéros et l’IRONIE DRAMATIQUE, un couple performant
    • Titillant notre curiosité, l’antihéros lorsqu’il fait une bonne action alors que c’est un personnage méchant ou mauvais, nous montre une capacité à changer, à trouver une certaine forme de rédemption. Nous sommes souvent avec lui car nous savons beaucoup de choses à l’avance par rapport aux autres personnages à qui il ment. C’est le cas de Walter White que nous suivons pas à pas dans son apprentissage du crime, ou Dexter (dont la voix off nous place dans la tête). Non seulement, nous sommes des spectateurs privilégiés mais l’intérêt réside à nous montrer comment l’antihéros, avec ses défauts, va réagir. C’est le cas dans Mes meilleures amies (Bridesmaids) ou son équivalent masculin Very Bad Trip (The Hangover), où les personnages nous semblent sympathiques parce qu’ils assument les plus folles situations avec humour.
  7. L’antihéros rencontre notre désir de TRANSGRESSION
    • Les antihéros ont certes des défauts qui en font parfois des connards, mais si le public y adhère c’est qu’ils ne sont pas des connards tout le temps. De même qu’un héros peut parfois mal se comporter, un personnage n’a pas besoin d’être gentil et doux en permanence pour être attachant. Si le protagoniste est notre clé d’entrée dans l’histoire, nous voulons nous identifier ou avoir du respect pour lui, surtout s’il agit comme nous devrions le faire parfois. Qui n’a pas rêvé un jour d’envoyer son boss balader comme Dr. House le fait avec Cuddy ? Qui n’a jamais voulu pouvoir se faire justice lui-même comme Dexter ? De Lisbeth Salander à Michael Corleone, les antihéros nous permettent de nous identifier quand ils se battent contre leurs agresseurs, quand ils sont aux prises avec des dilemmes moraux, quand ils montrent un sentiment de compassion, même sous des dehors difficiles. Même des personnalités limites comme Vic Mackey sont attrayants parce qu’ils sont puissants et leaders (et le public recherche ces qualités).
  8. L’antihéros et les AUTRES personnages
    • Plus que toute autre chose, les antihéros sont aussi sympathiques par nécessité : comme nous ne pouvons pas adhérer à un personnage qui est 100% méprisable, il suffit parfois pour rendre sympathique un personnage antipathique de le confronter à des personnages pires que lui. Pendant qu’Hannibal Lecter est aux prises avec le méchant Directeur de Prison, nous nous identifions à lui ; quand Dark Vador lutte contre l’empereur, nous sommes avec lui, etc. Montrez-nous un méchant puis quelqu’un de plus méchant et automatiquement, nous nous identifierons au premier. De même, montrez-nous un lâche puis quelqu’un raconter comment ce personnage a été très courageux une fois et automatiquement, nous nous intéresserons à lui. Vous l’avez compris, l’antihéros peut devenir très attachant lorsqu’il est aux prises avec d’autres personnages horribles ou que ses adjuvants nous font voir ses facettes cachées.
  9. L’antihéros est COMPLEXE
    • Cela peut sembler évident, mais, quand on essaye de comprendre les raisons pour lesquelles nous aimons des personnages comme Dexter, Dr. House, Walter White, c.-à-d. des personnages controversés en profondeur, il apparaît parfois que cela tient à peu de choses : une qualité essentielle qui rachète tout, un don hors du commun exploité dans un univers difficile etc. L’échec d’une connexion au public (l’erreur fatale à éviter) n’est jamais loin avec les antihéros. Il est d’autant plus important ainsi de verrouiller un ensemble de codes auxquels nous sommes habitués et qui passent par la gamme complète de la caractérisation des personnages. Plus votre antihéros sera sombre, plus vous devrez lui donner des traits secondaires complexes pour contrebalancer son archétype.
  10. L’antihéros est une VICTIME de la société
    • Comme preuve finale, nous pouvons prendre l’exemple du héros de Taxi driver, Travis Bickle.

      D’un premier abord, il semble tout à fait antipathique. C’est un revanchard mal dans sa peau, colérique, etc. que nous ne supporterions pas comme voisin de table lors d’un dîner, mais il est aussi un héros lumineux, incroyablement sympathique. C’est un guerrier rejeté par ceux pour qui il a combattu au Vietnam et qui nous parle en premier lieu de la difficulté pour un soldat à réintégrer la société civile. Il est, comme beaucoup d’entre nous, gêné par la prostitution, la toxicomanie et le crime. Pour de nombreuses raisons (y compris en prenant un rendez-vous romantique dans un cinéma porno) c’est un connard, mais il risque aussi sa vie pour sauver une fillette de 12 ans. Ainsi, même si nous ne pouvons pas adhérer à quelqu’un qui tente sérieusement d’assassiner une personnalité politique, nous sommes dans l’empathie car nous nous sentons responsable de sa trajectoire. Nous suivons ainsi sa folle entreprise comme une tentative de rédemption morale personnelle. C’est pourquoi sa trajectoire nous intéresse. C’est aussi la caractérisation de Rambo dans une moindre mesure. Plus votre antihéros aura des raisons d’être devenu ce qu’il est, plus nous aurons de l’empathie.

Que retenir ?

Ces dix règles peuvent se résumer à une seule : il n’y a pas de protagoniste de fiction à succès qui soit totalement antipathique.
Même les plus vils des personnages principaux de l’histoire du cinéma ont une qualité qui les rachète auprès du public. Aujourd’hui, ils ont le vent en poupe dans nos séries TV préférées, car nous semblons fascinés par des personnages faillibles tout autant qu’adorables. Mais la raison pour laquelle les antihéros sont fédérateurs n’est pas parce qu’ils sont antipathiques, transgressifs, surpuissants, etc.. mais c’est parce qu’il y a au moins une raison majeure de les aimer. Cette distinction fera toute la différence pour nous permettre de suivre avec intérêt leurs aventures, qu’ils s’enfoncent ou qu’ils s’en sortent avec brio.
La suite avec le billet : comment écrire un bon méchant ?

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