Quand TF1 et EuropaTV (la société de Luc Besson dédiée à la production d’unitaires et séries télé suite au rachat de Cipango) ont annoncé début 2012 leur partenariat pour fabriquer des séries internationales, nous attendions tous de voir le résultat. Cela est arrivé cette rentrée sur TF1 et continuera d’arriver pendant tout le courant 2013 […].
7 MIN. DE LECTURE
Quand TF1 et EuropaTV (la société de Luc Besson dédiée à la production d’unitaires et séries télé suite au rachat de Cipango) ont annoncé début 2012 leur partenariat pour fabriquer des séries internationales, nous attendions tous de voir le résultat. Cela est arrivé cette rentrée sur TF1 et continuera d’arriver pendant tout le courant 2013 avec une série de productions hexagonales et internationales de grande ampleur.
Le partenariat entre les chaînes françaises comme TF1 et EuropaCorp TV est gagnant-gagnant
D’un côté ces chaînes vont diffuser et vendre des séries à l’international (nouveaux profits en perspective pour de la production en propre tout en divisant les coûts avec des coproductions internationales), de l’autre la société de production s’attire une audience plus large.
Quand on sait que l’exportation des séries françaises à l’étranger rapporte à peine 20 millions d’euros par an pour l’instant (même pas le budget d’une copro internationale) ;
qu’elle ne concerne qu’un tout petit nombre de séries surtout faite par Canal+ (Engrenages sur la BBC 4, Chante rebaptisée Studio 24 sur Italia 1 l’après-midi, Borgia sur la ZDF en Italie et quelques autres) ;
et que la plupart du temps, nos séries sont tout simplement refaites avec les savoir-faire étrangers (Pigalle la Nuit, Braquo, Les Hommes de l’Ombre) que ce soit pour des fictions de 52′ ou pour des formats courts (Camera Café, Vous les Femmes) ;
on voit que des productions directement en langue anglaise peuvent faire la différence.
Dernier chiffre qui remet bien les pendules à l’heure :
Sur 783 heures de séries françaises diffusées en prime time dans les autres pays d’Europe, les séries britanniques en comptent 2 279… et les américaines plus de 20 000 (source A. Carrazé).
Luc Besson va-t-il pouvoir ainsi changer la donne ? On dirait pour le moins qu’il va y contribuer sérieusement en voyant le listing impressionnant des projets suivants :
Vive les séries d’action à l’américaine !
- En mode coproduction internationale avec tournage en langue anglaise, scénaristes et acteurs stars
- Sur M6 :
Le transporteur, nouveeau projet décliné en série de 12 x 52′ avec Chris Vance dans le rôle principal de cette coproduction internationale qui fait suite au succès mondial en salles des 3 films éponymes. Aux côtés de l’acteur bankable, nous retrouvons Delphine Chaneac (égérie M6) et François Berléand pour aider le héros à se sortir du pétrin quand il décide de changer ses propres règles et d’ouvrir les colis qu’il transporte. La première saison dotée d’un budget de 35 millions d’euros sera diffusée en 2012 sur les chaînes M6 en France, RTL en Allemagne, HBO-Cinemax aux États-Unis, The Movie Network2 et Movie Central3 au Canada. La série est produite par Atlantique Productions (Klaus Zimmermann), filiale de Lagardère Entertainment, en association avec QVF (Susan Murdoch) pour M6, RTL, HBO/Cinemax, Astral et Corus mais Luc Besson en reste l’un des producteurs exécutifs et la série est distribuée par EuropaCorp.
Une exploitation de la licence XIII (saison 2 en 13 x 45′) : XIII incarné encore une fois par Stuart Townsend, se retrouvera au coeur d’un nouveau complot international tout en continuant d’enquêter sur son passé. Créée par Roger Avary (coscénariste de Pulp Fiction) et produite par Europacorp Television (Thomas Anargyros et Edouard de Vésinne) et Prodigy Pictures, la saison 2 a un budget de 35 millions de dollars. Tournée en 2012, la saison 2 est diffusée actuellement sur Canal+ et en 2013 sur M6 ainsi que sur Global TV au Canada et ReelzTV aux US. - Sur Canal+ :
En 2012 : Le vol des cigognes, minisérie de 2 x 100′, réalisée par Jan Kounen avec un casting international parmi lesquels Harry Treadaway et Rutger Hauer et un budget conséquent de 10 millions d’euros. C’est une fresque épique et un road movie entre la Bulgarie, Israël, ou encore l’Afrique centrale sur fond de thriller, adaptée du roman de Jean-Christophe Grangé. Le pitch : un ornithologue suisse est mystérieusement retrouvé mort … dans un nid de cigognes. L’étudiant qu’il avait engagé, Jonathan, décide de continuer sa mission : suivre la migration des cigognes afin d’expliquer la disparition de beaucoup d’entre elles lors de la saison précédente. Jonathan sera confronté à son passé mystérieux et à un trafic de diamants…
En 2013 : La Patrouille Perdue/The Lost Patrol, une série de 12 x 52′ met en scène une patrouille de soldats français pendant la première guerre mondiale. La série suit le capitaine Declerq. En passant devant la Cour martiale, ce dernier évite la dégradation et la mort en se voyant confier par le Deuxième Bureau une mission qui le conduit au cœur du no man’s land entre les lignes françaises et allemandes. Là, des événements surnaturels semblent se produire, et Declerq a l’impression qu’il n’a pas été choisi par hasard. Le tournage est prévu en 2013. - Sur TF1 :
- MAJ : c’est Stephen Tolkin (scénariste de Brothers & Sisters) qui a pris les commandes de l’écriture pour l’ensemble des épisodes. Le pilote étant, quant à lui, déjà écrit et validé. Le tournage de la première saison commencera en mars à Toronto, mais l’action de la série se situera à New-York.
Taxi, la série : annoncé à La Rochelle, la célèbre trilogie initiée par Luc Besson va être adaptée en série internationale en 12 x 52′. Après No Limit, cette nouvelle coproduction confirme l’attrait de Besson pour les comédies d’action. Pour rappel, Taxi, le premier volet sorti en 1998 avait révélé Marion Cotillard, Samy Nacéri et Frédéric Diefenthal et avait attiré 6,5 millions de spectateurs. Taxi 2 sorti en 2000 avait fait mieux encore avec 10,3 millions d’entrées. En 2003, Taxi 3 avait rassemblé 6,1 millions de spectateurs. Nul doute que la franchise a des fans qui attendent avec impatience, cette nouvelle adaptation. Reste à savoir qui la production va choisir pour incarner le nouveau trio.
- Sur M6 :
- Sur TF1 pour le marché français :
- No limit : une mini-série en 6 x 52′ avec Vincent Elbaz en tête d’affiche qui incarne un agent à la DGSE atteint d’une maladie incurable, employé par un département secret qui lui propose un traitement expérimental en échange de missions spéciales sur le territoire français. Il les accepte pour se rapprocher de sa fille, de son ex-femme et de sa soeur, flic à la crime. Défi pour Vincent, il devra tout en cachant sa maladie et son métier, assumer la crise d’ado de sa fille, les états d’âme de son ex et la curiosité insatiable de sa soeur flic qui le trouve parfois bien secret pour un simple poseur d’alarmes… La série sera lancée le 15 novembre prochain sur TF1.
- (MAJ) : avec des audiences moyennes juste en-dessous des 7 millions de téléspectateurs pour les six premiers épisodes, la série a remporté son pari pour TF1. Une saison 2 de 8 épisodes de 52 min. a d’ores et déjà été commandée.
- Les Sous-Doués (nouveauté) seront adaptés en série de 12 x 52′ par Sébastien Azzopardi et Sacha Danino. Le projet est toujours en cours d’écriture et sera diffusé sur TF1, a priori, en 2013.
- Nom de code : Rose est un téléfilm en deux parties « légèrement » inspiré de l’ancienne série US des années 1980 Scarecrow & Mrs King (Les deux font la paire), qui suit Margot Chapelier (Claire Keim), une mère au foyer de trois enfants, qui accepte de jouer les agents secrets pour le compte de FX, un agent de la DCRI, qui a besoin d’elle pour obtenir des renseignements top secrets au sein de la société d’import-export où elle travaille. Margot se donne bonne conscience en sauvant ainsi sa maison de famille, mais assouvit surtout ses rêves d’évasion d’un quotidien un peu morne. Mené par Arnault Mercadier à la réalisation, le tournage s’est achevé début août.
- Remarque : il n’est pas à douter que ces projets auront des suites en cas de bonnes audiences.
- Sur France 2 (nouveauté) :
- Le Passager : projet adapté lui aussi d’un roman de Jean-Christophe Grangé en 6 × 52′. Cette mini-série met en scène Mathias Freire, un psychiatre désabusé qui reçoit un nouveau patient qui a perdu la mémoire du jour au lendemain. L’homme en question a par ailleurs été retrouvé proche d’une scène de crime bestiale. Au cours de la psychanalyse, le psychiatre est troublé par son patient en qui il se reconnait. Serait-il lui aussi un « passager sans bagages » qui a perdu la mémoire ? Et si oui, notre psychiatre redeviendra-t-il un hors-la-loi pourchassant son possible passé de tueur ?
- Sur France 3 (nouveauté) :
- Une collection de téléfilms adaptés des polars de Mary Higgins Clark est en développement sous l’égide de Claire Le Maréchal (Plus belle la vie, Fais pas ci, fais pas ça).
- Sur ARTE (nouveauté) :
- Une adaptation de la bande dessinée L’Ordre de Cicéron est en développement.
Que retenir : ça bouge au pays du fromage et des séries cheesy
Avec cette perçée en fiction, je n’ose plus dire « française », Luc Besson et ses amis ne sont pas les premiers à comprendre que la langue est un premier obstacle à surmonter pour pouvoir faire du business avec une série, de même que le format qui doit être le même qu’une série américaine :
- entre 45 et 50 minutes par épisode pour une série dramatique ;
- entre 21 et 25 minutes pour une comédie.
- Il faut d’ailleurs produire directement en saisons de 12 épisodes au moins pour tenir l’antenne.
- Les mini-séries continuent d’exister mais servent avant tout de test : No limit l’a réussi avec succès et une saison 2 est d’ores et déjà en cours d’écriture.
Alors que Canal+ affiche clairement ses ambitions de se positionner en leader du marché (cf. l’ensemble de son offre pour 2013) pour les fictions françaises à langue anglaise.
Les autres chaînes comme TF1, M6 et France TV se mettent à la copro mais évitent soigneusement de communiquer sur le sujet
- France 2 ne fait aucun commentaire sur sa copro avec la BBC Death in Paradise,
- tandis que M6 décide simplement de ne pas en parler du tout.
- TF1 se contente quant à elle d’ajouter que cette offre est complémentaire au reste de sa production de fiction.
Si le temps est venu ainsi de produire en se jetant sur le savoir-faire d’un Luc Besson par exemple (et d’autres grands groupes rassurants), il n’est pas encore venu celui d’en faire la publicité qui gênerait bien entendu les défenseurs de la création originale en langue française, CNC, scénaristes et petits producteurs français bien entendu, qui ont le plus à perdre avec ce type de programmes directement faits pour l’international (d’où aussi l’envie de s’adresser à un public français avec l’ensemble des autres projets du groupe). Loin d’être opposées, les deux offres pourraient donc être complémentaires et profiter à tout le monde…
Pré-raz de marée, ou tendance réservée à un certain type de programmes, nous verrons bien comment le public français va accueillir l’ensemble de ces nouvelles productions. Cela semble sentir plutôt bon au niveau des premières audiences… Il semblerait donc que nous n’ayons pas fini d’en entendre parler. Qu’en pensez-vous ?
Fabrice O.
Si Taken 2 marche un Taken 3 suivra et il y a fort à parier que cela deviendra une série. Dans celle-ci nous suivrons les extractions de la Taken squad !
Erwan
Y a plein de projets mais je trouve dommage de retrouver tant de séries sur du recyclé de films comme Taxi, Le Transporteur, XIII (une BD à la base si je ne trompe pas) au lieu de produire des nouveautés.
thierry
Il est toujours triste de constater qu'un simple nom, synonyme de modernité, de succès, d'adéquation avec une génération,de productions soignée, etc… puisse avec les années être le symbole du pré-mâché, du formatage (merci mozinor), un tampon du "a la ricain" version péjorative et un label du recyclage d'idées (celles des autres en général).
La télé est un nouveau terrain de jeu pour Europa, surtout depuis que son ciné bat de l'aile, espérons qu'ils comprendront et aimeront en plus que de le considérer comme un tuyau de plus.
High concept
@tous : définitivement j'adore Luc Besson. Regardez le pitch de son prochain film (dont le titre n'a pas encore été révélé) avec Kevin Kostner : "The thriller explores a story about Secret Service Agent Ethan Runner who discovers he’s dying and decides to retire in order to reconnect with his estranged family. But when the Secret Service offers him access to an experimental drug that could save his life in exchange for one last assignment, he soon finds himself trying to juggle his family, his mission, and the drug’s hallucinatory side-effects." Ca ne vous rappelle pas le pitch de No limit ? ou comment recycler ses bonnes séries et les vendre à tout le monde !!!
Fabrice O.
"Ca ne vous rappelle pas le pitch de No limit ? ou comment recycler ses bonnes séries et les vendre à tout le monde !!! "
Luc Besson aime la maxime de Lavoisier " Rien ne se perd, rien ne créer, tout se transforme."
Il est très fort comme ça il reste maître de son biz comme dirait Booba (ou un autre rappeur aimant l'argent). Ce qui est intéressant dans cet exemple c'est de constater qu'il n'attends pas d'avoir fait un succès avec la série avant d'en proposer la déclinaison cinéma.
De nos jours tout va de plus en plus vite … même Luc Besson.
Fabrice O.
Bon je viens d'apprendre que Liam Neeson n'était pas chaud pour faire un Taken 3. Est+ce à dire que Luc Besson n'en fera pas une série ?
Mystère et boule de gomme !
daredevil
Et puis le nom de l'agent secret Ethan Runner calqué sur Ethan Hunt de Mission Impossible.
Fabrice O.
Ah on vient d'apprendre l'instant que tout n'est pas perdu pour Taken 3. Lisez plutôt : Robert Mark Kamen a déclaré : « Nous n'avons pas commencé à en parler, mais nous avons vu les chiffes. Et là, on se dit : Okay, je pense qu'il faudrait faire un troisième épisode. Et la Fox veut nous voir faire un troisième épisode »
Etant donné que Liam Neeson n'est pas chaud pour tourner dans le trois faute de personnage à kidnapper, je propose ce picth : Kamen et Besson kidnappent Liam Neeson pour qu'il accepte de tourner Taken 3.
Et comme punchline dans la bande annonce on aurait : "Liam on va te traquer, te trouver et tu vas tourner Taken 3 !"
thierry
Pour moi, le but de Besson aujourd'hui n'est pas de faire du ciné, bon ou mauvais, et de la télé, bonne ou mauvaise.
Il a compris qu'il doit avant tout se constituer un catalogue qui lui permettra, le jour venu, de constituer une bonne retraite.
Le récent exemple de Lucas doit le faire rêver (qui n'en rêverait pas?).
Ma théorie c'est qu'il devait arrêter le ciné il y a quelques années, mais lorsqu'il s'est rendu compte qu'il ne profitait pas assez de ses premiers films (des contrats avec Gaumont a l'époque, qui le déversent surement, je suppose..).
Il s'est dit qu'en étant scénariste/réalisateur/producteur d'un nouveau et riche catalogue il pouvait enfin toucher a tous les robinets.
Pierre-Antoine Favre
Si EuropaTV peut renforcer ses moyens à partir de ses succès, tant mieux. Pour une fois qu'une société de production a peut-être la possibilité de devenir un acteur solide dans le paysage très morcelé des boîtes de production, mieux vaut s'en réjouir.
Après, sur la durée, ce sera intéressant de voir si l'indépendance financière encourage la prise de risque, si Besson en profite pour tenter de promouvoir des projets plus personnels ou plus audacieux auprès des chaînes TV… ou pas.
High concept
@Pierre-Antoine : la TV est surtout le média roi pour l'entertainment. À ce titre, Besson y a complètement sa place, ce qui explique l'ensemble de ses commandes actuelles. Espérons juste que le niveau d'exécution soit satisfaisant (il génère forcément beaucoup d'attentes en proposant des pitch de séries d'action à l'américaine) : à son équipe de ne pas décevoir. Ca a l'air plutôt bien parti on dirait. À suivre donc.