Les zombies ou morts-vivants fascinent le spectateur et ont inspiré grand nombre de cinéastes et scénaristes. Ces personnages semblent être le reflet inquiétant de nos failles profondes et penchants sadiques : écrire le film d'horreur et le sous-genre du film de zombie, décryptage.
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Du film culte (« La nuit des morts-vivants » et « Zombie » de George A.Romero), aux blockbusters (de l’excellent « World War Z » de Marc Forster au beaucoup moins bon « Resident Evil » de Paul Anderson…) sans oublier « 28 jours plus tard » du talentueux Danny Boyle et bien sûr l’incontournable série télévisée « The walking Dead » tirée de la non moins formidable B.D éponyme de Robert Kirkman et Tony Moore…
Pour ne citer qu’eux, ces créatures nous fascinent plus encore que tout autre vampires, loups-garous ou autres monstres horrifiques qui ont pourtant également contribué à grand nombre de succès cinématographiques. Pourquoi les scénarios intégrant ces créatures fonctionnent-ils si bien au sein du genre horreur ?
Le zombie : une passerelle entre la vie et la mort.
Le mort-vivant en tant que tel se présente comme une alternative possible à notre phobie la plus extrême, celle dont personne ne peut échapper : la mort !
Ces créatures l’ont, d’une certaine façon, vaincue et même, s’il est vrai que revenir de l’au-delà sans pouvoir articuler deux mots et n’avoir pour seul et unique objectif que de se nourrir de chair humaine (ou tout au moins animale) n’est pas forcément la meilleure vision offerte de la vie éternelle, elle aurait tendance à nous rassurer et surtout nous fasciner puisque l’homme passe sa vie à tenter de vaincre cette créature omniprésente et sans pitié qu’est la grande faucheuse. Les morts-vivants reviennent de l’au-delà ! Comment ? Pourquoi ? Dans quel but ? (à compter qu’il y ait un)…
Tout autant de questions auxquelles ces œuvres tentent de répondre sans vraiment trouver d’explications plausibles. Mais en voulons-nous vraiment une ?
Le zombie : un exutoire face à nos fantasmes morbides inavouables.
« L’homme est un loup pour l’homme ». Les films de Zombie ont tous pour scènes inhérentes ces moments de carnages ou les humains assouvissent leurs instincts primaires en massacrant grand nombre de morts vivants l’esprit en paix puisqu’il s’agit de sauver leurs vies, d’une part et d’autre part, car ces créatures ne sont officiellement plus des êtres vivants.
Rappelez-vous cette séquence dans « Zombie » (« Dawn of the Dead ») ou un pseudo régiment, fusils en bandoulières, part en troupe « défendre l’humanité » et se livre à un carnage organisé de putréfiés au sein de la campagne. Ne vous évoque-t-elle pas cette autre scène de partie de chasse de « La règle du jeu » de Jean Renoir qui voulait ainsi souligner les affres de l’oisiveté d’une certaine aristocratie de l’époque.
Romero en fait de même dans « Zombie » en remplaçant les lapins par des morts-vivants. L’alibi est identique : l’homme à défaut de réguler la nature et l’écologie, tue pour sauver l’humanité et y trouve une extrême jouissance tout comme (hélas ?) le spectateur.
C’est ce côté « obscur » de notre nature qui est notamment mis en évidence dans « The walking Dead ». Les monstres ne sont finalement pas ceux que l’on croit. Livrés à eux-mêmes et dans l’obligation de reconstruire une société les instincts les plus sombres des hommes resurgissent : meurtres, viols, cannibalisme, torture, soumissions physiques et psychologiques…. Les morts-vivants sont finalement relégués au second plan et deviennent en quelque sorte spectateurs de notre barbarie.
Le zombie : le miroir de nos faiblesses et erreurs passées.
Fondement même du genre horreur ou le protagoniste paie ses actions négatives antérieures, le mort-vivant nous confronte à nos failles. Toujours dans « Dawn of the Dead » souvenez-vous de cette scène où l’on découvre des milliers de zombies errant autour d’un centre commercial comme si certaines habitudes passées demeuraient toujours en eux : « C’est une sorte d’instinct, un souvenir de ce qu’ils faisaient avant. C’était un lieu important dans leurs vies. » En plus d’une féroce critique du consumérisme, Romero pointe du doigt l’insignifiance de nos vies et nous renvoie à nos doutes, hontes et faiblesses : nous vivons tels des zombies la majorité de nos journées.
Au travers de tout ceci, on voit donc que le Zombie est à la fois un cas d’école et une exception du genre horreur tel qu’il est enseigné le plus souvent et notamment chez High concept :
- Il pousse l’homme dans ses retranchements et soulève des questions existentielles comme la nature de la mort (peut-elle être empêchée, détournée, repoussée… ?), les côtés obscurs de l’être humain et ses grandes peurs, l’émancipation du passé…
- Le GHOST (épreuve que le protagoniste n’a pas réussi à surmonter dans son passé et qui revient le hanter), élément essentiel et indispensable du genre horreur en général n’est ici que secondaire voir même souvent inexistant.
- L’antagoniste véritable (le monstre) n’est pas le Zombie (qui reste un protagoniste faible, stupide et sans désir ni besoin véritable si ce n’est celui de se nourrir) mais l’être humain lui-même dont les penchants pervers sont mis en exergue via la situation qu’il subit ou ses expériences passées (une forme de ghost ?).
- Enfin, et c’est peut-être l’élément le plus paradoxal du genre horreur/Zombie, certaines erreurs rédhibitoires en général fonctionnent ici parfaitement : enchaînement des scènes gores, l’intrigue souvent simpliste et assez répétitive, l’arène réduite voir même un espace confiné laissant peu de latitude au héros pour réagir (souvenez-vous de la cave de « la nuit des morts-vivants »)….
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L’horreur, le nouveau genre roi des scénaristes… français ?
Quoi qu’il en soit, le mort-vivant reste une source inépuisable de situations et d’idées pour le scénariste amateur du genre horreur. C’est tout d’abord une créature « contemporaine », ou du moins qui a vu sa notoriété exploser il y a seulement cinquante ans, même s’il est vrai que son « existence » remonte aux temps ancestraux du peuple haïtien et de ses croyances vaudou, il est plus facile pour l’auteur de relier et d’associer ces créatures à nos « démons » sociétaires actuels.
« La nuit des morts-vivants » à l’époque de sa sortie et même si Romero a toujours nié avoir eu cette intention, fut unanimement reconnue par les critiques comme un pamphlet contre le racisme. Les zombies sont le miroir des phobies qui gangrènent notre société contemporaine : la peur de l’autre, la fin du monde, le terrorisme et la radicalisation religieuse…
Comment ne pas comparer ces foules de migrants prêtes à tout pour passer les frontières aux hordes de morts-vivants de « World War Z » s’amassant frénétiquement pour franchir le mur de protection construit autour de Jérusalem ? Du S.D.F que personne ne regarde plus, au terroriste sans conscience au volant d’un camion ou harnaché d’une ceinture d’explosifs, sans oublier le salarié « connecté » à sa tâche huit heures durant, le constat est cruel et sans appel : nous sommes tous des zombies !
A bientôt pour un autre article et pour tous ceux et celles qui souhaiteraient creuser un peu plus le sujet, vous avez la masterclass dédiée à l’écriture de l’horreur et des articles gratuits de notre blog, comme celui sur le film d’horreur, comment créer un monstre qui fait peur.
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