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ScriptDoctor.frBlog du scriptdoctorQuand l’exception culturelle française plombe la création originale

Quand l’exception culturelle française plombe la création originale


Le modèle anglo-saxon est souvent qualifié d’industriel et est réputé pour son système de production en série. En face, le pays de Beaumarchais aurait une vision plus « latine » avec un système de production artisanal où son exception culturelle rayonnerait. Question de culture, de techniques d’écriture, de rythme, les américains et les français ont deux conceptions […].

4 MIN. DE LECTURE


écrit par Carole Bertrand dans veille métier de la production audiovisuelle ‒ devenir scénariste

Le modèle anglo-saxon est souvent qualifié d’industriel et est réputé pour son système de production en série. En face, le pays de Beaumarchais aurait une vision plus « latine » avec un système de production artisanal où son exception culturelle rayonnerait. Question de culture, de techniques d’écriture, de rythme, les américains et les français ont deux conceptions opposées de la télévision, et tout particulièrement de la fiction. Cependant, c’est en France qu’une crise éditoriale, financière et générationnelle s’est installée. Comme je le rappelais dans un billet précédent, la fiction US ou plus récemment européenne s’est substituée à la fiction française. Pour beaucoup c’est un problème d’écriture. Voyons plus loin.


La fiction française s’exporte difficilement du fait de son identité prononcée, c’est FAUX !

Certes, la fiction française ne s’exporte que très peu à l’étranger (cf. Bilan des exportations audiovisuelles : ce que le CNC ne vous dit pas) mais nous importons, à l’inverse, un nombre important de programmes américains, anglais, allemands, suédois, néerlandais et même espagnols. On pourrait penser que les problématiques franco-françaises, nos modes de vie, nos codes, sont trop spécifiques pour toucher un public étranger.
Certains producteurs français déclarent avoir entendu des chaînes estimer que produire une fiction mettant en scènes des français, avec des problématiques françaises, n’aurait pas de succès à l’étranger. Cependant, cela n’est pas un obstacle pour la culture américaine, qui est bien acceptée et même prise pour modèle, en France comme dans le monde entier. Nous regardons des séries danoises, suédoises, norvégiennes, israéliennes depuis peu sans nous sentir également gênés par leurs spécificités culturelles. Nous voyons bien ainsi que ce n’est pas une question de contenu.

Les américains vendent des séries à l’international car ces dernières sont adaptées à ce marché. Elles utilisent des codes et des thématiques universelles, tels que l’amour, la mort, la maladie, pour toucher le public étranger et ces schémas testés fonctionnent.

Judith Louis, directrice des programmes de fiction d’Arte – qui a eu la bienveillance de m’accorder un entretien – s’étonne et constate en même temps :
« C’est incompréhensible, nous nous passionnons pour des séries américaines qui se déroulent au fin fond du Wisconsin, dans de toutes petites villes… Je ne sais pas pourquoi, mais dans le sens inverse ça ne marche pas. Peut-être parce que les personnages sont moins forts… ».

L’Exception culturelle permet à la fiction française de s’épanouir, c’est FAUX !

La notion d’Exception Culturelle, instituée par Beaumarchais, désignait la défense de notre culture nationale face au reste du monde et plus tard contre l’« industrie américanisée », considérée comme dangereuse. Plus récemment, on parlait de « diversité culturelle », terme plus large sous-entendant une ouverture sur le monde. On peut donc s’étonner que la France, championne de l’Exception culturelle, soit pourtant l’un des derniers pays à être capable d’exporter sa fiction et que ses séries soient, à quelques exceptions près, toujours derrière la fiction US sur les ondes nationales.
La culture est en effet un moyen d’exporter un point de vue sur le monde. C’est le rayonnement d’un pays sur les autres.

L’argument est alors souvent donné par les officiels pour défendre notre modèle économique que certes, en France, la production de fiction n’est pas industrialisée – notamment en séries – mais grâce à l’Exception culturelle appliquée en fiction sur le modèle cinématographique, nous pouvons faire des choses qui ne se font pas ailleurs.

Mais que penser d’un art qui ne s’exporte pas et qui est fait dans son placard (c’est-à-dire un point de vue non partagé par les autres) ?
L’Exception culturelle devrait nous permettre au contraire de tirer un avantage de notre propre fiction, avec des moyens de production et une vision d’auteur forte. Or, nous observons strictement l’inverse.

  • La majorité des séries françaises ne défendent aucun point de vue fort sur le monde.
  • La France, première destination touristique mondiale, ne profite pas (assez) de son image pour satisfaire la demande d’un public étranger friand de tour Eiffel.

    Judith Louis se souvient : « quand je travaillais chez France 2, on racontait justement que l’une des séries qui se vendaient le mieux à l’international à l’époque […] était « Nestor Burma ». Parce qu’on y voyait Paris, les ponts de Tolbiac, le Panthéon… C’était le carton, la série française qui se vendait le mieux. ». Cette tentation fut incarnée plus récemment par JO, avec Jean Réno, qui n’a pas rencontré non plus le succès escompté auprès des ménagères. Un comble pour le pays du droit d’auteur.

Les différences majeures entre les conditions de production de la fiction américaine et celles de la fiction française résulteraient d’une différence de modèle culturel global. Nous avons, d’un côté, un marché industrialisé à outrance, dans lequel le réalisateur et les scénaristes sont considérés comme des employés techniciens, les techniques d’écriture sont très formatées et pourtant, c’est bien dans ce contexte que se sont distinguées des séries à haute valeur ajoutée artistique. De l’autre, les français considèrent l’oeuvre d’un point de vue latin, et sont encore réticents à accepter un système de production sérielle quand il s’agit d’art.

Les différences structurelles n’expliquent pas tout

Selon Thierry Bizot, producteur chez Elephant et Cie, il s’agirait d’un critère quantitatif :
«Les modèles (français et américain de production de fiction) ne sont pas si différents que ça. Ce qui est différent, c’est le marché. Quand vous êtes producteur de télévision en France, vous avez cinq personnes qui peuvent vous passer commande. Aux USA, il y en a cinquante ».

25 chaînes gratuites et 200 chaînes régionales ou nationales, mais seulement 5 capables de passer commande, contre 500 chaînes et une cinquantaine qui passent commande aux Etats-Unis.

Que penser alors des pays émergents comme la Suède, la Norvège, Israël qui ont des marchés domestiques encore plus restreints que la France et dont la fiction est pourtant reconnue à l’international ?
La suite au prochain épisode, mais n’hésitez pas à partager avec nous ce que vous inspirent ces remarques.
Pour approfondir, retrouvez l’ensemble de mes billets :

  • La crise économique de la fiction française ;
  • Les raisons de la crise de la fiction française ;
  • La fiction française à l’ère de la TV connectée ;
  • Crise des séries TV françaises : une question de culture ? ;
  • Les séries US ont-elles tué la fiction française ?

Retrouvez également toutes les informations sur mon profil sur la page de l’équipe High concept.


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