Paradoxe amusant : peut-on se poser à l'écriture la question de la fin d'une série tv quand une œuvre récurrente n'a justement pas vocation à finir. Censée pouvoir durer une centaine d'épisodes, toute série tv qui se respecte renaît de ses cendres en se renouvelant sans arrêt à chaque saison, en théorie… Dans la pratique, la corde s'use parfois plus rapidement que prévu mais quand le savoir avec certitude ? La saison de trop peut être une catastrophe pour un diffuseur qui préfère toujours arrêter avant que son public ne se soit entièrement lassé, d'où certaines frustrations récentes à l'arrêt de séries US cultes qui n'avaient peut-être pas dit tout ce qu'elles avaient à dire.
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Paradoxe amusant : peut-on se poser à l’écriture la question de la fin d’une série tv quand une œuvre récurrente n’a justement pas vocation à finir. Censée pouvoir durer une centaine d’épisodes, toute série tv qui se respecte renaît de ses cendres en se renouvelant sans arrêt à chaque saison, en théorie… Dans la pratique, la corde s’use parfois plus rapidement que prévu mais quand le savoir avec certitude ? La saison de trop peut être une catastrophe pour un diffuseur qui préfère toujours arrêter avant que son public ne se soit entièrement lassé, d’où certaines frustrations récentes à l’arrêt de séries US cultes qui n’avaient peut-être pas dit tout ce qu’elles avaient à dire.
Usure du concept, fatigue des auteurs, lassitude des acteurs, la fin d’une série devient une figure imposée périlleuse de l’autre côté de l’atlantique tandis qu’en France, c’est un luxe que peu de séries peuvent s’offrir : la plupart de nos séries n’étant jamais sûres de passer le cap de la diffusion, chaque saison est conçue pour avoir une fin provisoire acceptable, d’où un refus d’obstacle permanent de la vraie récurrence (à quelques exceptions près). Pouvons-nous néanmoins tirer des leçons des finales (prononcez finalés) de Dexter, Breaking Bad et autres Docteur House ?
- Les arrêts sans préavis
- Les fins programmées
- la série coûte trop cher (Terra nova),
- un comédien décide de passer à autre chose (Dexter, Seconde chance),
- l’audience se tasse (Lost ou beaucoup de vieilles gloires françaises comme Julie Lescaut).
- Alors comment réussir la fin de sa série télé ?
- ouverte : elle doit clore les différentes intrigues menées sur l’ensemble des épisodes tout en permettant aux personnages de repartir éventuellement pour de nouvelles aventures (en les replaçant à leur point de départ par exemple).
- Logique : la fin de la série ne peut pas sortir complètement de votre chapeau. Elle doit être l’une des possibilités référencées comme solution possible dans les épisodes précédents. Changer les règles du jeu à la fin serait une cause de rupture de contrat avec le spectateur, ce qui peut expliquer en partie les finales ratés de Dexter ou de Lost par exemple.
- Inévitable ou « appropriée »: elle doit paraître évidente, comme si la série n’avait pas pu se terminer autrement.
- Inattendue : c’est la cerise sur le gâteau. Si vous apportez la révélation d’un détail ou d’une ironie dramatique, vous arriverez en plus d’apporter une fin satisfaisante à votre histoire, à donner tout son sens à l’action de vos héros.
Quand les audiences chutent, certains diffuseurs ne prennent pas de risques et sont capables d’arrêter la diffusion d’une série avant même parfois qu’elle ait pu livrer la promesse qui avait séduit au départ. Il est bien évident que ces séries ne possèdent pas de fin à proprement parler.
Quelques épisodes et puis c’est tout. On se souvient de La croisière cette année, ou de L’Hôpital en 2007 sur TF1. Les autres chaînes françaises n’interrompent généralement pas leurs diffusions en cours de route mais peuvent en changer la programmation à des horaires moins exposés en deuxième partie de soirée par exemple. On se souvient ainsi de Duo sur France 2 (dont j’avais parlé cf. Duo : quand F2 jette ses séries à la poubelle).
Aux US, les arrêts sauvages sont légions et ne choquent plus personne : cette année We are men a été annulée au bout de deux épisodes (cf. notre point sur les nouvelles sitcoms US 2013), Next caller au bout de 3 épisodes, Made in Jersay au bout de 8 épisodes, Animal Practice au bout de 9, Last Ressort, Zero Hour au bout de 13 épisodes. On se souvient aussi de Profit qui avait retrouvé un succès de fortune lors de sa sortie DVD en France et qui n’avait duré que 8 petits épisodes…
Les fans de séries tv le savent, toutes les bonnes histoires ont une fin. C’est la raison pour laquelle, l’annonce de la dernière saison d’une série longue se fait parfois un an à l’avance, histoire de faire monter la sauce.
Les raisons d’arrêt sont alors multiples :
Mais quelles sont celles qui sont parties en plein succès ? On pense à Friends ou Seinfeld, je ne vois pas de cas français bien sûr équivalent car nos séries les plus longues sont en fait des collections d’épisodes bouclés écrits par des auteurs différents, le créateur n’étant plus présent depuis longtemps. Certaines de nos séries actuelles pourraient cependant prétendre à un finale : Un village français, Profilage, ou d’autres plus récentes, à vous de me dire.
En effet, imaginer la fin d’une série est toujours un calvaire pour son créateur : comment mettre fin à un univers qui a duré parfois une centaine d’épisodes ? Le finale n’est-il alors pas toujours décevant ? Que dire de la fin de Lost, de Dexter ou plus anciennement de Prison Break ? Je ne ferais pas de spoiler ici, mais bien évidemment, le finale est un épisode spécial qui doit permettre de clore toutes les lignes narratives en apportant une solution originale et satisfaisante alors que beaucoup de voies différentes ont été creusées au long des années et qu’il est toujours difficile de contenter tout le monde.
Traditionnellement la fin est le moment décisif d’une histoire, celle où le héros atteint son objectif et où l’histoire est terminée (circulez, il n’y a plus rien à voir).
Mais pour obtenir une fin satisfaisante, il ne suffit pas de faire atteindre (ou pas) au héros son objectif de départ, car il faut que nous comprenions en même temps quel a été le sens de son voyage (autrement dit, la morale à en tirer). Dans ce cadre, la fin de votre série doit être ouverte (pour laisser une possibilité à tous vos personnages de repartir vers une nouvelle aventure), logique, inévitable et paradoxalement tout de même surprenante :
La fin de Friends correspond bien ainsi à l’ensemble de ces nécessités : nous laissons les personnages terminer leur aventure tout en laissant une porte ouverte sur d’autres possibilités d’histoire.
Il n’y a qu’en série que la fin n’a au fond pas d’importance, car ce qui compte, c’est le voyage…
En effet, avant d’envisager la fin d’une série tv, il faut surtout s’être donné les moyens d’avoir bien commencé et ensuite d’avoir permis de continuer sur un nombre important d’épisodes.
Aucune fin ne viendra hausser le niveau d’une série médiocre car la force d’un bon épisode final est de nous ravir des personnages devenus familiers avec qui nous avions pris des habitudes. Installer vos personnages dans une tâche récurrente suite à un déclencheur décisif est donc bien le travail le plus important de tout créateur de série tv.
Pour apprendre à le faire sur vos projets originaux, n’hésitez pas ainsi à vous inscrire à notre Masterclass : Écrire et vendre une série tv qui a été conçue pour vous livrer tous les secrets d’écriture des meilleures séries tv actuelles US et françaises.
N’hésitez pas à partager avec nous vos meilleurs ou pires souvenirs d’épisodes finaux tout en prévenant auparavant de vos éventuels spoilers…
À très vite sur le blog avec plein de surprises pour janvier et de nouveaux intervenants, ce qui explique aussi le rythme plus espacé de nos publications… ;-).
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